L’instruction des dossiers d’AJ peut rester anonyme

Tout administré à le droit de connaître le prénom, le nom, la qualité et l’adresse administratives de l’agent chargé d’instruire sa demande (art. L. 111-2 du CRPA).

Mais le Conseil d’Etat vient de poser que ce régime ne s’applique pas aux procédures relatives aux décisions prises en matière d’aide juridictionnelle (AJ), car ces dernières sont des décisions d’administration judiciaire.

Cette solution n’est pas surprenante car les décisions des présidents de juridiction statuant sur les demandes dirigées contre les décisions des bureaux d’aide juridictionnelle étaient déjà de telles décisions d’administration judiciaire (CE, 22 janvier 2003, , n° 244177, rec. T. p. 941).

La juridiction judiciaire est ainsi compétente pour connaître des décisions ou mesures qui relèvent du fonctionnement du service public de la justice et dont l’examen se rattache à la fonction juridictionnelle ou conduit à porter une appréciation sur la marche même des services judiciaires.

Sources : pour les décisions ou instructions relatives aux greffiers, voir TC, 2 mai 1977, rec. p. 666 ; idem pour la compétence de communication de documents qui sont judiciaires et non administratifs : CE, 9 février 1983, n° 34650. Sur les actes de ce service public relatifs aux gérants de tutelle, tuteurs, curateurs, experts ou mandataires judiciaires, idem la compétence reste bien judiciaire même si l’on aurait pu y voir des agents ou des collaborateurs de ce service public : Cass. 1re civ., 9 janvier 2007, n° 06-13.138 ; CE, S., 13 juillet 1961, rec. p. 489 ; TC, 20 janv. 2003, n° 3295 ; CE, 22 novembre 2002, n° 215591…

On retrouve la frontière, fondée sur un critère matériel, au titre duquel il faut :

« distinguer les litiges relatifs à l’organisation du service, qui relèvent de la compétence administrative, de ceux qui touchent à la « marche même », c’est-à-dire au fonctionnement de la justice judiciaire.»
(points clefs du — très bon — fasc. 1052 du JurisClasseur Administratif, par M. Thierry Fossier, mise à jour par M. Vincent Tchen).

Sources de base : TC; 27 novembre 1952, Préfet de la Guyane, GAJA, 15e éd., n° 70 ; CE, 17 avril 1953, Falco et Vidaillac, rec. 175. Sur les agents (compétence souvent administrative à cette aune : CE, Ass., 27 mai 1949, Véron-Réville, n° 93122 et n° 96949 ; CE, Ass., 5 novembre 1976, rec. p. 472 ; CE, 13 mars 1987, p. 95 ; CE, 14 juin 2010, n° 330344, CE, 30 juin 2003, n° 231836 ; CE, 23 juillet 2010, n° 328463 et n° 328722).

Source de cette nouvelle décision :

Conseil d’État, 29 novembre 2022, n° 443735, aux tables du recueil Lebon