Abandon de poste : le Conseil d’État rappelle la procédure.

Par un arrêt Mme B… c/ commune de Bouillargues en date du 23 décembre 2022 (req. n° 463591), le Conseil d’État a confirmé sa jurisprudence constante selon laquelle un arrêté de radiation des cadres pour abandon de poste ne peut être prononcé qu’après que l’agent a été mis en demeure de reprendre son poste dans un délai approprié et informé du risque encouru d’une radiation  des cadres sans procédure disciplinaire préalable, sauf à justifier d’un motif valable avant la notification de l’arrêté de radiation.

En l’espèce, Mme A…, agent de la commune de Bouillargues, a été radiée des cadres de la commune pour abandon de poste par arrêté du maire en date du 21 mars 2022. Mme A… a alors saisi le juge des référés du tribunal administratif de Nîmes, lequel a estimé que le moyen tiré de ce que Mme A… n’aurait pas été régulièrement mise en demeure de reprendre ses fonctions était de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision de radiation des cadres. Il a en conséquence suspendu, sur le fondement de l’article L. 521-1 du code de justice administrative, l’exécution de l’arrêté précité par son ordonnance du 15 avril 2022.

La commune de Bouillargues s’est alors pourvue en cassation devant le Conseil d’État contre cette ordonnance.

Tout d’abord, le Conseil d’État rappelle conformément sa jurisprudence constante (CE, 10 octobre 2007, Centre hospitalier intercommunal André Grégoire, req. n° 271020, Rec. 419 ; CE 5/6 CHR, 6 mai 2021, Centre hospitalier Sud Francilien, n° 428957; CE, 24 avril 2019, Commune d’Annecy, n°413264) qu’une « mesure de radiation des cadres pour abandon de poste ne peut être légalement prononcée que si l’agent concerné a, préalablement à cette décision, été mis en demeure de rejoindre son poste ou de reprendre son service dans un délai approprié qu’il appartient à l’administration de fixer. Une telle mise en demeure doit prendre la forme d’un document écrit, notifié à l’intéressé, l’informant du risque qu’il court d’une radiation des cadres sans procédure disciplinaire préalable. Lorsque l’agent ne s’est pas présenté et n’a fait connaître à l’administration aucune intention avant l’expiration du délai fixé par la mise en demeure, et en l’absence de toute justification d’ordre matériel ou médical, présentée par l’agent, de nature à expliquer le retard qu’il aurait eu à manifester un lien avec le service, cette administration est en droit d’estimer que le lien avec le service a été rompu du fait de l’intéressé. »

Or, en l’occurrence, la commune de Bouillargues avait adressé à Mme A…, le 1er mars 2022, un courrier reçu le 3 mars suivant, la mettant en demeure de reprendre ses fonctions au plus tard le 18 mars à 8 h 30. Cette lettre précisait qu’en l’absence de retour à son poste, la commune serait contrainte d’engager à son encontre une procédure pour abandon de poste engendrant une radiation des cadres sans procédure disciplinaire. La commune l’informait en outre qu’elle avait épuisé ses droits à congé de maladie ordinaire depuis le 5 janvier 2022 et que l’arrêt de prolongation de son arrêt de travail jusqu’au 15 mars 2022 ne faisait état d’aucun élément nouveau relatif à son état de santé.

Par conséquent, conclut le Conseil d’État, « en jugeant qu’était de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée le moyen tiré de ce que Mme A… n’avait pas été régulièrement mise en demeure de reprendre ses fonctions, le juge des référés a dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis. »

Après avoir annulé l’ordonnance, le Conseil d’État rejette la demande de suspension de Mme A… au motif qu’aucun des moyens qu’elle a soulevés n’était de nature à faire naître un doute sérieux sur l’arrêté contesté.

Cet arrêt peut être consulté à partir du lien suivant :

https://www.conseil-etat.fr/fr/arianeweb/CE/decision/2022-12-23/463591