Recours contre l’avis négatif de l’ABF : le pouvoir réglementaire est bien compétent pour en fixer les modalités

Le législateur n’a pas méconnu son office quand il a omis de préciser si le recours administratif contre l’avis négatif de l’architecte des Bâtiments de France doit ou non être exercé préalablement au recours contentieux contre le refus d’autorisation d’urbanisme faisant suite à cet avis. 

 

Les paragraphes I et III de l’article L. 632-2 du code du patrimoine, dans leur rédaction revue en 2018, précisément notamment les conditions de recours contre l’avis défavorable de l’architecte des Bâtiments de France à l’occasion du refus d’autorisation de certains travaux.

Des requérants reprochaient à ces dispositions de ne pas préciser si le recours administratif prévu contre l’avis négatif de l’architecte des Bâtiments de France doit obligatoirement être exercé préalablement au recours contentieux contre le refus d’autorisation d’urbanisme faisant suite à cet avis.

Il en a résulté une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) posée au Conseil constitutionnel sur le point de savoir si ces dispositions ne seraient pas inconstitutionnelles, pour incompétence négative (le législateur étant donc accusé de n’avoir pas rempli son entier office au point d’affecter le droit à un recours juridictionnel effectif).

Or, le Conseil constitutionnel a estimé que le législateur n’avait pas commis une telle incompétence négative car le Parlement s’est arrêté là où commençaient les compétences du pouvoir réglementaire :

6. Il résulte toutefois des articles 34 et 37 de la Constitution que les dispositions de la procédure à suivre devant les juridictions administratives relèvent de la compétence réglementaire dès lors qu’elles ne mettent pas en cause les règles ou les principes fondamentaux placés par la Constitution dans le domaine de la loi.

7. En vertu des articles L. 621-32 et L. 632-1 du code du patrimoine, certains travaux aux abords d’un monument historique ou dans le périmètre d’un site patrimonial remarquable sont soumis à autorisation. En application du paragraphe I de l’article L. 632-2 du même code, la délivrance de cette autorisation est subordonnée à l’accord de l’architecte des Bâtiments de France.

8. Les dispositions contestées de l’article L. 632-2 prévoient qu’un recours administratif contre l’avis de l’architecte des Bâtiments de France peut être exercé par le demandeur à l’occasion du refus d’autorisation de travaux.

9. Ces dispositions sont relatives à la procédure administrative et ne mettent pas en cause l’exercice, par les administrés, du droit d’agir en justice. Ainsi, en ne déterminant pas lui-même les conséquences de l’absence d’exercice de ce recours administratif sur la recevabilité d’un recours contentieux, le législateur n’a pas méconnu l’étendue de sa compétence. Au demeurant, l’exigence d’un recours administratif préalable, à peine d’irrecevabilité d’un recours contentieux, ne méconnaît pas le droit à un recours effectif tel qu’il résulte de l’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789.

 

Voir :

Décision n° 2022-1032 QPC du 27 janvier 2023, M. Osman B. [Recours contre l’avis défavorable de l’architecte des Bâtiments de France à l’occasion du refus d’autorisation de certains travaux], Conformité