Tennis au Luxembourg : nouvelle balle faute (un peu difficile à prévoir) et Nième rebond

Concessions de services et activités sportives : quand laisser trop de choix possibles aux candidats vicie la procédure, la multiplicité des choix possibles finissant par, selon le juge des référés du TA de Paris, par ne plus permettre de garantir l’égalité de traitement des candidats et la transparence de la procédure… Ce qui est un nouveau rebond dans l’affaire des tennis du Luco jardin du Luxembourg :

  • I. Une affaire qui s’inscrit au lendemain d’une volte-face du Conseil d’Etat sur certaines occupations domaniales (pour se rapprocher, enfin, du droit européen)… et à la suite d’une longue série d’autres affaires « Paris Tennis »
  • II. Sauf que c’est sur le droit des concessions de service que rebondit cette affaire… avec un juge des référés du TA de Paris qui estime que, pour la pratique sportive, trop laisser d’alternatives sur les possibles occupations sportives, ne permet plus de juger selon les critères sportifs correspondants

 

 

I. Une affaire qui s’inscrit au lendemain d’une volte-face du Conseil d’Etat sur certaines occupations domaniales (pour se rapprocher, enfin, du droit européen)… et à la suite d’une longue série d’autres affaires « Paris Tennis »

 

Douze ans après sa très contestable (au regard du droit européen déjà applicable à l’époque) décision Jean Bouin (CE, 3 décembre 2010, Ville de Paris, n° 338272), le Conseil d’Etat faisait machine arrière avec deux décisions importantes :

Le Conseil d’Etat s’amendait donc et il revenait au principe de l’application de règles de concurrence pour les occupations domaniales (même hors marché publics ou DSP ou hors exploitation économique). Cétait un revirement de jurisprudence et cela constitue la 1e application claire par le Conseil d’Etat de la grille d’analyse de l’arrêt CJUE 14 juillet 2016 Promoimpresa Srl, aff. C-458/14, Mario Melis e.a., aff. C-67/15.

Mais les règles de concurrence imposées par cette jurisprudence se trouvent limitées par le Conseil d’Etat au seul domaine public, et encore n’est-ce qu’en cas d’accès à celui-ci avec une « faible disponibilité »… ce qui se discute en droit de l’Union européenne).

A ces divers sujets, voir :

 

De tout ceci on pouvait déduire le schéma opérationnel suivant :

 

II. Sauf que c’est sur le droit des concessions de service que rebondit cette affaire… avec un juge des référés du TA de Paris qui estime que, pour la pratique sportive, trop laisser d’alternatives sur les possibles occupations sportives, ne permet plus de juger selon les critères sportifs correspondants

Regardons la dernière de ces hypothèses… celle où l’occupation domaniale, cumulativement :

  • ne porte PAS sur le domaine privé
  • n’est PAS constitutive d’un marché public ou d’une concessions (dont DSP)…
  • ne vise PAS à une exploitation économique (au sens de l’article L. 2122-1-1 du CG3P)
  • donne lieu à un « faible accès » à ce domaine public (avec une « faible disponibilité »)

 

Si ces conditions se trouvent réunies… alors il faut organiser une mise en concurrence assez légère, mais dont les contours à ce jour ne répondent à aucun cadre juridique précis. Il faut mettre en place des règles de bon sens  un peu comme en MAPA… En attendant que la jurisprudence ne nous éclaire.

Et… justement, c’est ce qu’elle vient de faire (avec une  nouvelle nouvelle nouvelle affaire « Paris Tennis » gagnée par ladite société… au terme d’une décision du TA de Paris rendue après, tout de même, deux audiences !).

Sauf que ce n’est pas une convention d’occupation domaniale avec mise en concurrence ad hoc, inventée sur mesure faute d’autre cadre juridique qui a été faite par le Sénat… mais une « concession de service pour l’exploitation des six courts de tennis du Jardin du Luxembourg et des locaux du Pavillon Raynal, servant de guichets d’accueil et de vestiaires

Le titulaire de la concession devait, aux termes des documents de consultation, assurer l’organisation, le développement et la promotion d’une pratique et d’un enseignement du tennis inscrits dans la vie locale et largement ouverts au public  et, notamment, réserver aux associations sportives du Sénat 25 % des créneaux disponibles pour l’utilisation des courts de tennis, à la pratique libre du tennis, 35 % des créneaux restants et à l’enseignement du tennis au maximum 65 % des créneaux restants. 

La société Paris Tennis, dont l’offre pour l’attribution de la concession a été rejetée, a demandé l’annulation de la procédure de passation.

La juge du référé précontractuel :

  • rappelle que la personne publique devait apporter aux candidats à l’attribution d’une concession, avant le dépôt de leurs offres, une information suffisante sur la nature et l’étendue des besoins à satisfaire et indiquer aux candidats les caractéristiques essentielles de la concession.
  • relève, s’agissant du l’organisation de l’enseignement du tennis, que les candidats étaient autorisés à choisir entre la location de l’ensemble des créneaux à des tiers, l’utilisation de ces créneaux par leur propre école de tennis ou bien une organisation mixte avec l’utilisation d’une partie des créneaux par leur école de tennis et la location des créneaux restants à des tiers.
  • considère que le choix offert aux candidats sur l’organisation de l’enseignement du tennis ne leur permettait pas de présenter des offres comparables au regard des trois critères de jugement des offres définis par le pouvoir adjudicateur dans le règlement de la consultation, soit l’intérêt du projet pour le Jardin du Luxembourg et les usagers des terrains de tennis, la robustesse de l’offre financière et la qualité de l’organisation de l’exploitation.
  • en conclut qu’en laissant aux candidats un tel choix sur l’organisation de l’enseignement du tennis, le Sénat n’a pas prévu des modalités d’examen des offres garantissant l’égalité de traitement des candidats et la transparence de la procédure et annule la procédure de passation de la concession.

 

Voir :

TA Paris, ord., 8 juin 2023, n°N° 2309069:3-5