L’été dernier, le présent blog commentait des décisions tant nationales que spécifiquement alsaciennes et mosellanes en matière d’ouverture dominicale des commerces. Voir :
Le juge des référés du TA de Strasbourg a rendu hier une ordonnance intéressante sur le droit alsacien et mosellan à ce sujet.
Le préfet du Bas-Rhin a autorisé les commerces de détail situés sur le territoire de la ville de Strasbourg à :
ouvrir le dimanche 14 janvier 2018 de 10h à 18h30, en employant du personnel sur la base du volontariat ;
Cet arrêté se trouve :
motivé par les mesures de sécurité adoptées pour autoriser le marché de Noël qui ont restreint l’accès au centre-ville, par la baisse de chiffre d’affaires en résultant pour les commerces concernés et par le fait que les besoins de la population n’ont pu être pleinement satisfaits durant cette période, les produits offerts par les commerces de grandes zones commerciales ou la vente par correspondance ne pouvant se substituer à ceux offerts par ces commerces ;
De fait, dans les trois départements concernés, l’article L. 3134-7 du code du travail permet de telles ouvertures mais encore faut-il que les « circonstances locales rendent nécessaire une activité accrue » :
« L’emploi de salariés dans les entreprises industrielles, commerciales ou artisanales est interdit les dimanches et jours fériés, sauf dans les cas prévus par le présent chapitre » ; […]
qu’aux termes de l’article L. 3134-4 du code du travail : « Dans les exploitations commerciales, les salariés ne peuvent être employés le premier jour des fêtes de Noël, de Pâques ou de Pentecôte. / Les autres dimanches et jours fériés, leur travail ne peut dépasser cinq heures. / Par voie de statuts ayant force obligatoire, adoptés après consultation des employeurs et des salariés et publiés selon les formes prescrites, les départements ou communes peuvent réduire la durée du travail ou interdire complètement le travail pour toutes les exploitations commerciales ou pour certaines branches d’activité. / Pendant les quatre dernières semaines précédant Noël ou pour certains dimanches et jours fériés pour lesquels les circonstances locales rendent nécessaire une activité accrue, l’autorité administrative peut porter le nombre d’heures travaillées jusqu’à dix. / Les heures pendant lesquelles le travail a lieu sont déterminées, compte tenu des horaires des services religieux publics, par les dispositions statutaires qui ont réduit la durée des heures de travail et, dans les autres cas, par l’autorité administrative. Elles peuvent être fixées de façon différente pour chaque branche d’activité commerciale. (…). » ; qu’aux termes de l’article L. 3134-7 du même code : « Des dérogations aux dispositions des articles L. 3134-3 et L. 3134-4 peuvent être accordées par l’autorité administrative pour les catégories d’activités dont l’exercice complet ou partiel est nécessaire les dimanches ou les jours fériés pour la satisfaction de besoins de la population présentant un caractère journalier ou se manifestant particulièrement ces jours-là. (…). » ;
Le TA a suspendu l’arrêté préfectoral, confirmant que le juge assure un contrôle poussé de la qualification desdites circonstances locales et des dispositions prises en conséquence par le préfet :
6. Considérant qu’ainsi que l’exposent les syndicats requérants, l’arrêté querellé a pour effet, à titre dérogatoire, de faire travailler les salariés des commerces concernés, déjà fortement mobilisés trois dimanches avant Noël, un nouveau dimanche se situant dans une période rapprochée ; que cette décision est de surcroit adoptée avec un bref délai séparant son édiction du dimanche concerné, soit seulement six jours, imposant nécessairement à une partie des salariés des contraintes dans l’organisation de leur vie personnelle, particulièrement familiale ; que dès lors et quand bien même la mesure serait d’effet limité et ne concernerait que les salariés réputés volontaires, avec des compensations salariales et de jours de congés importantes, les syndicats requérants sont fondés à soutenir qu’il est porté atteinte, dans ces circonstances, de façon grave et immédiate aux intérêts collectifs qu’ils déclarent représenter ; qu’ il est par ailleurs constant que, par un jugement irrévocable en date du 14 juin 2017, rendu sous les n° 1700144-1700156, le Tribunal de céans a annulé comme méconnaissant les dispositions de droit local susmentionnées un précédent arrêté du 23 décembre 2016 du préfet du Bas-Rhin adopté dans les mêmes circonstances, sur le même fondement, reposant sur les mêmes motifs et ayant la même portée ; que les syndicats requérants sont dès lors fondés à soutenir que la non-prise en compte par l’administration du sens de cette précédente décision d’annulation porte atteinte à un intérêt public, dès lors qu’en l’absence de suspension, le préfet pourrait, nonobstant l’annulation de sa mesure précédente, la réitérer chaque année ;
que dans ces conditions, sans que la circonstance invoquée par le préfet, que seuls les salariés volontaires seraient concernés par la mesure, et celle exposée par le représentant de l’association des commerçants « les vitrines de Strasbourg », que les mesures de sécurité prises pour le marché de Noel affectent très sensiblement le chiffre d’affaires des commerces du centre ville, soient de nature à la relativiser, les syndicat requérants doivent être regardés comme justifiant l’urgence à obtenir la suspension de ce nouvel arrêté ;
Voici l’ordonnance TA Strasbourg, 11 janvier 2018, n° 1800117-1800127 :