Quelle est la nature du contrôle que le juge exerce sur la méthode de notation mise en place par un acheteur public afin d’apprécier les offres des soumissionnaires ? Telle est la question à laquelle le Conseil d’Etat a répondu par un arrêt du 22 novembre 2019, Cars Annequin, req. n°418460 et 418461.
Dans cette affaire, qui concernait la passation d’un marché à bons de commande pour l’entretien des espaces verts, le Conseil d’État rappelle tout d’abord le principe de liberté de choix de l’acheteur dans la définition de “la méthode de notation pour la mise en œuvre de chacun des critères de sélection des offres qu’il a défini et rendu publics”.
Cependant, le Conseil d’État énonce que cette liberté de choix n’est naturellement pas arbitraire. A ce titre, les méthodes de notation doivent respecter “les principes fondamentaux d’égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures”.
Surtout, il précise que sont irrégulières les méthodes qui :
“sont par elles-mêmes de nature à priver de leur portée les critères de sélection ou à neutraliser leur pondération et (…), de ce fait, susceptibles de conduire, pour la mise en œuvre de chaque critère, à ce que la meilleure note ne soit pas attribuée à la meilleure offre, ou, au regard de l’ensemble des critères pondérés, à ce que l’offre économiquement la plus avantageuse ne soit pas choisie”.
Appliquant ainsi ce considérant de principe au cas d’espèce, il constate que l’appréciation d’un des deux sous-critères relatifs à la valeur technique de l’offre dépendait exclusivement “de l’indication par le candidat lui-même d’une note dite de qualité “ consistant en une auto-évaluation.
Il considère que
“une méthode de notation des offres par laquelle le pouvoir adjudicateur laisse aux candidats le soin de fixer, pour l’un des critères ou sous-critères, la note qu’ils estiment devoir leur être attribuée est, par elle-même, de nature à priver de portée utile le critère ou sous-critère en cause si cette note ne peut donner lieu à vérification au stade de l’analyse des offres”.
Ainsi, une méthode de notation, y compris pour l’appréciation d’un sous-critère ne représentant que 20% de la note du critère relatif à la valeur technique, lui-même ne représentant que 25% de la note globale de l’offre, qui consiste à faire entièrement dépendre cette note d’une auto-évaluation par le candidat, sans que l’acheteur en vérifiant cette appréciation puisse y apporter des modifications est illégale.
La Haute Assemblée a ainsi conclu en énonçant que la circonstance que la méthode de notation aurait été publiée dans les documents de la consultation, respectant ainsi le principe de transparence et que le non-respect de son auto-évaluation par le candidat choisi entrainerait l’application de pénalités au stade de l’exécution n’est pas de nature à rendre une telle méthode légale.
Article rédigé avec la collaboration d’Alexandre Panzani