Le Conseil d’Etat, à hauteur de cassation, s’empare de la notion d’ensemble contractuel .
D’une part, le Conseil d’Etat, à hauteur de cassation, vient de poser qu’il exerce un contrôle de la qualification juridique des faits quant à l’existence, ou non, d’un ensemble contractuel.
D’autre part, le juge administratif accepte, dans les relations entre le monde public (une CCI en l’espèce pour un aéroport) avec les entreprises, de regrouper des prestations éparses en un seul ensemble contractuel en fonction de ce qu’étaient les négociations globales, ce qui pour le dossier de transport aérien qu’il avait à traiter, est une bonne nouvelle pour le décideur public (dans d’autres affaires, ce pourrait être une moins bonne nouvelle).
M. A., ancien président d’une chambre de commerce et d’industrie (CCI) a été condamné par la Cour de discipline budgétaire et financière (CDBF) pour avoir signé des contrats et avenants irréguliers avec des sociétés de transport aérien à bas coûts et la filiale de l’une d’entre elles.
Par son arrêt, la CDBF a jugé que les contrats de prestations de service marketing conclus par la CCI avec ces deux sociétés étaient autonomes de ceux conclus avec ces mêmes sociétés pour la prestation de services aéroportuaires de desserte aérienne de son aéroport et qu’ainsi, ils ne formaient pas avec eux un même ensemble contractuel. La CDBF s’est sur ce point fondée sur le fait que ces contrats avaient été signés à des dates différentes, que leur durée n’était pas identique et que l’objet des contrats de marketing en cause était de faire la promotion de la région concernée sur le site Internet d’une entreprise de transport à bas coûts sans la limiter à la promotion de la desserte effectuée par cette entreprise.
Le Conseil d’Etat, juge de cassation à ce stade, a estimé :
- d’une part, donc, qu’il pouvait contrôler la qualification juridique des faits opérée par le juge du fond (la CDBF en l’espèce), ce qui est une information importante quant aux moyens de cassation pouvant être soulevés à ce stade.
Le Conseil d’Etat, à hauteur de cassation, vient de poser qu’il exerce un contrôle de la qualification juridique des faits quant à l’existence, ou non, d’un ensemble contractuel.
Il est à rappeler que l’appréciation des faits relève du juge du fond, à la base. Là, nous avons un contrôle étendu de la qualification juridique des faits, opéré par le Conseil d’Etat, juge de cassation, qui va fort loin…
- d’autre part, en l’espèce, que les entreprises de transport concernées avaient subordonné le maintien de leur desserte à la conclusion des contrats de prestations de service marketing en cause et que, dès lors, ces derniers étaient non dissociables des contrats de prestations aéroportuaires et formaient en conséquence avec eux un même ensemble contractuel, la Cour de discipline budgétaire et financière a inexactement qualifié les faits qui lui étaient soumis.
Le second apport de cet arrêt est donc que le juge va prendre en compte pour qualifier la notion d’ensemble contractuel la réalité des éléments joints en une même négociation, en quelque sorte.
En l’espèce, cela a permis l’annulation de l’arrêt de la CDBF : M. A., poursuivi pour infraction financière, a donc gagné. Dans d’autres dossiers, cette définition englobante, large, de la notion d’ensemble contractuel pourrait au contraire se retourner contre les décideurs publics (en termes de regroupement de prestations éparses pour l’appréciation des seuils de mise en concurrence à respecter…).
Source : CE, 7 octobre 2020, n° 433986, à publier aux tables du recueil Lebon
http://www.conseil-etat.fr/fr/arianeweb/CE/decision/2020-10-07/433986