Dans la très grande majorité des cas, les plans locaux d’urbanisme posent la règle selon laquelle un terrain n’est constructible que s’il est desservi par une voie publique ou une voie privée suffisantes.
Lorsque la desserte du terrain est assurée par une voie privée, il est souvent exigé du pétitionnaire la démonstration qu’il détient un droit sur celle-ci, comme par exemple un droit de passage issu de la servitude du même nom.
Dans une décision en date du 23 septembre 2021, le Conseil d’Etat a utilement précisé comment il fallait appréhender la situation où le terrain d’assise de la construction était desservi par un chemin d’exploitation, soit un chemin qui sert “exclusivement à la communication entre divers fonds” selon l’article L. 162-1 du Code rural.
Après avoir rappelé que, selon ce même article, ces chemins sont présumés appartenir à chaque propriétaire riverain, le Conseil d’Etat a jugé qu’un terrain desservi par un chemin d’exploitation devait en principe être considéré comme accessible et donc constructible dès lors que son propriétaire était présumé détenir un droit de propriété sur voie :
“En premier lieu, aux termes de l’article L. 162-1 du code rural et de la pêche maritime : ” Les chemins et sentiers d’exploitation sont ceux qui servent exclusivement à la communication entre divers fonds, ou à leur exploitation. Ils sont, en l’absence de titre, présumés appartenir aux propriétaires riverains, chacun en droit soi, mais l’usage en est commun à tous les intéressés. L’usage de ces chemins peut être interdit au public “. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le terrain d’assiette du projet litigieux n’est pas directement desservi par une voie publique mais par l’allée Pompadour, allée privée sur laquelle un portail a été érigé, et pour laquelle les pétitionnaires ont fait valoir, sans être sérieusement contestés, qu’elle constituait un chemin d’exploitation, dont l’usage est commun à tous les propriétaires riverains, au sens de ces dispositions. Par suite, en jugeant que les pétitionnaires ne justifiaient d’aucun titre créant une servitude ou un quelconque droit de passage sur cette voie de desserte, sans tirer la conséquence de leur qualité de propriétaires riverains de ce chemin, le tribunal administratif a commis une erreur de droit”.
Naturellement, pour rendre le terrain constructible, le chemin d’exploitation qui le dessert doit également présenter des caractéristiques (largeur, aménagement, etc) permettant son utilisation par les services de secours.
Si cette dernière condition est vérifiée, son simple statut de chemin d’exploitation permet de considérer que le terrain est bien desservi par une voie privée sur laquelle le pétitionnaire dispose de droits suffisants pour pouvoir accueillir une construction.
Précisons enfin que, contrairement à ce que son appellation pourrait laisser croire, un chemin d’exploitation n’est pas forcément situé en zone rurale.
En effet, et c’était d’ailleurs le cas dans l’affaire qui a donné lieu à cette décision du Conseil d’Etat, une voie privée desservant des parcelles ayant vocation à être urbanisées peut être qualifiée de chemin d’exploitation dès lors que les conditions mentionnés à l’article L. 162-1 du Code rural sont remplies (v. en ce sens : Cass., 3ème, 11 février 2016, Pourvoi n° 14-14981).
Ref. : CE, 23 septembre 2021, req., n° 435616. Pour lire l’arrêt, cliquer ici