Aisances de voirie : une intéressante illustration du contrôle opéré par le juge administratif

En 2019, le maire de la commune de B. a interdit l’accès à une parcelle au niveau du plateau ralentisseur d’entrée d’agglomération, les conditions de sécurité n’étant plus assurées.

La personne concernée par cet accès pouvait continuer de rentrer chez elle, mais uniquement par une autre entrée.

Le TA de Rennes a validé cette décision, mais non sans être entré — ce qui est normal — dans un contrôle poussé de la pertinence de cette mesure :

« 5. Sauf dispositions législatives contraires, les riverains d’une voie publique ont le droit d’accéder librement à leur propriété. L’exercice du droit d’accès des riverains à leur immeuble s’entend du droit d’entrer et de sortir de la propriété à pied ou en voiture, sans gêne ni risque anormal pour les autres usagers de la voie publique. Ce droit est au nombre des aisances de voirie. Par suite, dans le cas d’une voie communale, le maire, autorité gestionnaire de la voie en vertu des dispositions précitées du code général des collectivités territoriales, ne peut porter atteinte au libre accès des riverains à la voie publique, lequel constitue un accessoire du droit de propriété, que si cette mesure est justifiée par des motifs tirés de la conservation et de la protection du domaine public ou de la sécurité de la circulation sur la voie publique. Il appartient au maire de concilier les droits d’accès des riverains avec les nécessités de la circulation et du stationnement dans la commune.
6. Il ressort des pièces du dossier que la sortie de la parcelle de M. G., qui fait l’objet du présent litige, se situe dans un virage à la visibilité réduite et à l’intersection entre plusieurs voies, lesquelles sont de plus en plus empruntées en raison de l’urbanisation du bourg de la commune. Afin d’améliorer la sécurité routière et de limiter les conflits d’usage de la voirie, le maire de la commune a décidé de procéder à un aménagement de la rue de T. visant à réduire la vitesse autorisée, en limitant notamment le gabarit de la voie et en développant un cheminement réservé aux piétons et cyclistes. Constatant que la haie de l’un des riverains de la rue de T. entravait la visibilité des engins agricoles à la sortie du champ, ainsi que celle des véhicules qui quittent l’agglomération, mais également que la sortie d’engins agricoles sur une voie réservée aux mobilités douces engendrait un risque d’accident, le maire de la commune a préféré interdire l’accès à la parcelle xxxx depuis le ralentisseur d’entrée d’agglomération de la rue de T., tout en maintenant l’accès à cette même parcelle située à 120 mètres de distance qui offre une meilleure visibilité. M. G., dont l’accès à sa parcelle agricole est ainsi préservé, n’établit pas que l’accès depuis cette seule entrée présenterait des inconvénients ou des dangers pour les usagers de la voie publique. Au regard de ces éléments, M. G. n’est pas fondé à soutenir que le maire aurait fondé sa décision sur une appréciation erronée des conditions de sécurité de la circulation sur la rue de T.. Le requérant ne démontre pas davantage que cette décision ne serait pas proportionnée aux objectifs de sécurité routière, auxquels tendent les dispositions précitées du code général des collectivités territoriales.

Source : TA Rennes, 2 décembre 2021, n° 1903791

Le résumé qu’en fait le tribunal est au moins aussi intéressant :