Une codification à droit constant est par définition confirmative des dispositions antérieures. Donc une ordonnance de codification législative à droit constant, ou un décret ou un arrêté de codifications réglementaires à droit constant ne devraient pas pouvoir donner lieu à recours pour excès de pouvoir, ces actes étant purement confirmatifs.
Mais une codification n’est jamais réellement, entièrement, à droit constant, comme encore très récemment le Code général de la fonction publique (voir ici et là) en témoigne.
Alors, pragmatique, le Conseil d’Etat vient de poser que :
- Dans l’exercice des pouvoirs qu’il tient de l’article 38 de la Constitution, il appartient au Gouvernement, lorsqu’il est habilité à adopter à droit constant une nouvelle rédaction de la partie législative d’un code dans le but d’en améliorer l’accessibilité et l’intelligibilité dans le respect de la hiérarchie des normes, de procéder, conformément à l’habilitation qui lui a été donnée, aux modifications nécessaires pour assurer le respect, par les dispositions qu’il adopte, de la hiérarchie des normes. Cette circonstance de droit nouvelle interdit de regarder ces nouvelles dispositions comme purement confirmatives des dispositions législatives antérieures. Par suite, les conclusions tendant à l’annulation des dispositions d’une telle ordonnance non ratifiée sont recevables devant le juge de l’excès de pouvoir.
- Et il en va bien sûr de même pour la partie réglementaire d’un code, prise en conséquence de l’adoption de la partie législative du code : celle-ci ne peut, en principe, pas davantage être regardée comme purement confirmative des dispositions règlementaires antérieures (voir déjà en ce sens s’agissant de dispositions réglementaires se bornant à reprendre des dispositions antérieures mais pour tirer les conséquences d’une loi nouvelle : CE, 7 décembre 2018, Société TBF Génie Tissulaire, n° 410887).
En 1979, le Conseil d’Etat avait tenu un raisonnement inverse dans le cas d’une codification purement réglementaire n’étant pas la suite d’une codification législative (faite ou non par voie d’ordonnance).
Ce raisonnement pour la partie réglementaire d’un code ne semble pas, dans les nouvelles formulations du Conseil d’Etat, indissolublement liée au fait que la codification réglementaire est la conséquence de la codification législative. Donc on peut penser que la jurisprudence de 1979 est remise en cause aussi par cette nouvelle décision de la Haute Assemblée. Ceci dit, cette distinction entre codification réglementaire à droit constant résultant ou non d’une modification législative (même à droit constant) reste très présente dans cette nouvelle décision de 2022 comme elle l’avait été dans la décision précitée de 2018. Un doute peut donc encore subsister sur ce point précis.
Source : Conseil d’État, 24 février 2022, n° 450285, à mentionner aux tables du recueil Lebon