En cas de recours introduit contre une autorisation d’urbanisme, l’article L. 600-5-1 du Code de l’urbanisme permet au juge, s’il estime que celle-ci est entachée d’irrégularité, de surseoir à statuer afin de permettre au pétitionnaire de régulariser son projet en sollicitant, puis en obtenant, un permis de construire modificatif.
Depuis 2018, on sait que cette régularisation peut intervenir par le biais de l’évolution de la règle d’urbanisme, la légalité du permis modificatif devant s’apprécier par rapport aux règles en vigueur à la date de son édiction, celles-ci pouvant être plus favorables au projet par rapport à celles qui étaient applicables lors de la délivrance du permis initial (v. à ce sujet notamment : https://blog.landot-avocats.net/2018/03/13/regularisation-dun-permis-de-construire-en-cours-de-procedure-et-ca-continue-encore-et-encore/).
Pour le dire simplement, un permis peut être régularisé en cours de procédure par une évolution favorable de la règle d’urbanisme.
Une telle régularisation a posteriori peut-elle aussi résulter d’un changement des circonstances de fait, comme, par exemple, une évolution de l’environnement du projet au cours du temps ?
Le Conseil d’Etat vient d’apporter une réponse positive à cette interrogation en rappelant que la légalité du permis de construire modificatif délivré en vue de régulariser un projet s’apprécie en prenant en compte l’évolution de la règle de droit mais aussi le changement des circonstances de fait existantes à la date de son adoption.
Ainsi, un projet de construction situé sur un terrain soumis à loi Littoral qui, à à la date où le permis initial a été délivré, ne pouvait être autorisé faute d’être situé dans la continuité d’un espace urbanisé, peut être régularisé si, depuis, son environnement a évolué dans le sens de son urbanisation :
“Lorsqu’une autorisation d’urbanisme a été délivrée en méconnaissance des dispositions législatives ou réglementaires relatives à l’utilisation du sol ou sans que soient respectées des formes ou formalités préalables à la délivrance de l’autorisation, l’illégalité qui en résulte peut être régularisée par la délivrance d’une autorisation modificative dès lors que celle-ci assure le respect des règles de fond applicables au projet en cause, répond aux exigences de forme ou a été précédée de l’exécution régulière de la ou des formalités qui avaient été omises. Elle peut, de même, être régularisée par une autorisation modificative si la règle relative à l’utilisation du sol qui était méconnue par l’autorisation initiale a été entretemps modifiée ou si cette règle ne peut plus être regardée comme méconnue par l’effet d’un changement dans les circonstances de fait de l’espèce. Les irrégularités ainsi régularisées ne peuvent plus être utilement invoquées à l’appui d’un recours pour excès de pouvoir dirigé contre l’autorisation initiale.
Ainsi, le juge administratif saisi de la contestation de la légalité d’une autorisation d’urbanisme initiale ayant fait l’objet d’une autorisation modificative doit, pour apprécier s’il y a lieu le respect par le projet des dispositions du I de l’article L. 146-4 du code de l’urbanisme ou, depuis le 1er janvier 2016, de l’article L. 121-8 de ce code, rechercher si, à la date de la délivrance de l’autorisation modificative, les constructions projetées se trouvent en continuité avec des zones déjà urbanisées caractérisées par un nombre et une densité significatifs de constructions”.
Ref. : CE, 10 octobre 2022, Société Territoire Soixante-Deux, req., n° 451530. Pour lire l’arrêt, cliquer ici