Une demande de permis d’aménager en vue de la réalisation d’un lotissement doit-elle être favorablement accueillie s’il n’est pas certain que les règles du PLU seront respectées par les constructions futures ? Non, vient de répondre le Conseil d’Etat dans une décision rendue le 26 février 2016. Les circonstances qui ont donné lieu à cette décision permettent de mesurer aisément l’importance de cette décision.
Le PLU de la commune de Pia prévoyait que, dans certaines zones, tout projet comprenant au moins trois logements devait comporter un minimum de 30 % de logements sociaux. Saisie d’une demande d’un permis d’aménager présentée par un promoteur, la commune accueillit favorablement cette demande et autorisa les divisions foncières permettant la réalisation du lotissement. Mais le Préfet déféra le permis devant le Tribunal administratif au motif, qu’à la lecture du règlement du lotissement établi par l’aménageur, il n’était pas possible de vérifier que les règles précitées du PLU seraient effectivement respectées.
Sous une apparente simplicité, la question qu’a dû trancher le Conseil d’Etat était en réalité plutôt délicate : bien qu’un permis d’aménager un lotissement n’autorise aucune construction à proprement parler (puisque l’article L. 442-1 du Code de l’urbanisme définit le lotissement comme une opération de division foncière en vue de la création de lots destinés à être bâtis), la collectivité compétente doit-elle dès ce stade s’assurer que les règles du PLU relatives aux constructions ne seront pas méconnues ?
Pour le Conseil d’Etat, les lotissements doivent respecter la totalité des dispositions d’un PLU, même si leurs effets sont limités au détachement de lots d’une unité foncière. Dès lors : “il appartient, en conséquence, à l’autorité compétente de refuser le permis d’aménager sollicité ou de s’opposer à la déclaration préalable notamment lorsque, compte tenu de ses caractéristiques telles qu’elles ressortent des pièces du dossier qui lui est soumis, un projet de lotissement permet l’implantation de constructions dont la compatibilité avec les règles d’urbanisme ne pourra être ultérieurement assurée lors de la délivrance des autorisations d’urbanisme requises“.
Aussi, l’annulation du permis d’aménager délivré par la commune de Pia par la Cour administrative d’appel de Marseille a été confirmée par le Conseil d’Etat, celui-ci ayant relevé que le règlement du lotissement ne contenait aucun élément permettant de vérifier le respect de la règle du PLU rendant obligatoire la construction d’au moins 30 % de logements sociaux.
La charge des services instructeurs saisis d’une demande de permis d’aménager va donc être alourdie : non seulement ils seront tenus de s’assurer que l’opération d’aménagement respecte la règlementation d’urbanisme mais, désormais, ils devront aussi veiller à ce que le projet de construction envisagé par le lotisseur ne méconnaisse pas la même règlementation, et ce, à un moment où aucun permis de construire n’a encore été déposé.
Mais cette nouvelle jurisprudence du Conseil d’Etat a au moins un mérite et il est de taille : elle permet d’éviter la délivrance d’un permis d’aménager pour un projet dont les permis de construire ultérieurs pourraient être refusés. En matière de lotissement, il n’y a donc pas de demi-mesure…
Ref. : CE, 26 février 2016, Commune de Pia, req., n° 383079.