Refuser, à un agent, l’accès à un local est une mesure insusceptible de faire l’objet d’un recours contentieux sauf si ce local est syndical.

Par un arrêt Mme H en date du 10 décembre 2021 (req. n° 440458), le Conseil d’État a jugé que si la décision refusant à un agent l’accès à un local est une mesure d’ordre intérieur insusceptible de faire l’objet d’un recours contentieux, il n’en va pas de même lorsque ce refus porte atteinte à l’exercice d’une liberté fondamentale. Il va ainsi lorsque ce local est un local syndical et que l’agent souhaite s’y rendre en sa qualité de représentant syndical. Il en va de même pour l’accès à un panneau syndical.

En l’espèce, Mme H…, contrôleuse principale des finances publiques, s’est rendue le 1er août 2017 à la direction spécialisée des finances publiques (DSFP) pour l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris (APHP), où elle était affectée jusqu’à la fin du mois. Par un courrier daté du même jour, le directeur spécialisé des finances publiques, après avoir listé les congés dont Mme H… devait bénéficier au cours du mois d’août 2017, lui a interdit de se présenter dans les locaux de la direction à compter du deuxième jour du même mois et lui a demandé de restituer la clef du local syndical et du panneau d’affichage syndical, ainsi que son badge.

Par un jugement du 7 février 2019, le tribunal administratif de Paris a rejeté pour irrecevabilité la demande de Mme H… tendant à l’annulation pour excès de pouvoir de cette décision en tant qu’elle lui interdit d’accéder aux locaux de la DSFP. Mme H… s’est alors pourvu en cassation contre l’arrêt du 5 février 2020 par lequel la cour administrative d’appel de Paris a rejeté son appel contre ce jugement.

Pour annuler l’arrêt d’appel, le Conseil d’État précise que « les mesures prises à l’égard d’agents publics qui, compte tenu de leurs effets, ne peuvent être regardées comme leur faisant grief, constituent de simples mesures d’ordre intérieur insusceptibles de recours. Il en va ainsi des mesures qui, tout en modifiant leur affectation ou les tâches qu’ils ont à accomplir, ne portent pas atteinte aux droits et prérogatives qu’ils tiennent de leur statut ou à l’exercice de leurs droits et libertés fondamentaux, ni n’emportent perte de responsabilités ou de rémunération. Le recours contre de telles mesures, à moins qu’elles ne traduisent une discrimination ou une sanction, est irrecevable. »

Or, poursuit la Haute Assemblée, Mme H… ayant « la qualité de responsable syndicale au sein de la DSFP », elle « accédait à ce titre au local syndical ainsi qu’au panneau d’affichage syndical. » Aussi, la « décision par laquelle le directeur spécialisé des finances publiques a interdit à Mme H… d’accéder aux locaux de la DSFP à compter du 2 août 2017 et lui a demandé de remettre la clef du local syndical et celle du panneau d’affichage syndical porte ainsi atteinte à l’exercice de la liberté syndicale qui est au nombre des droits et libertés fondamentaux. Par suite, elle ne présente pas le caractère d’une mesure d’ordre intérieur mais constitue un acte susceptible de recours. »

Il en résulte qu’en jugeant que cette décision ne pouvait être regardée comme faisant grief à Mme H… au motif qu’elle était en congé au mois d’août et n’avait ainsi plus vocation à accéder à ces locaux, la cour administrative d’appel de Paris a commis une erreur de droit. Par suite, Mme H… était fondée à demander l’annulation de l’arrêt qu’elle attaque.

Cet arrêt peut être consulté à partir du lien suivant :

https://www.conseil-etat.fr/fr/arianeweb/CE/decision/2021-12-10/440458