Le décret sur la lutte contre la déforestation importée dans les achats de l’État est publié !

 

L’objectif avait été posé l’été dernier par la loi climat et résilience et le décret d’application est paru ce lundi : l’État ne doit plus acheter ce qui risque de causer de la déforestation importée.

 

I.             Définition et enjeux de la déforestation importée

 

Voilà quelque temps que la lutte contre la déforestation importée est considérée comme partie intégrante de la lutte contre de réchauffement climatique et pour la préservation de la biodiversité. Citée dans l’axe 15 du Plan Climat de la France, puis ayant fait l’objet d’une Stratégie Nationale en 2018, elle y est définie de la manière suivante (Extrait de la Stratégie Nationale de lutte contre la Déforestation Importée, Ministère de la transition écologique, 2018) :

« L’importation de matières premières ou de produits transformés dont la production a contribué, directement ou indirectement, à la déforestation, à la dégradation des forêts ou à la conversion d’écosystèmes naturels en dehors du territoire national »

 

Elle consiste ainsi à additionner à la préservation des forêts à l’intérieur du territoire, celle des forêts du monde puisque face à ces grands enjeux du siècle, la France n’est évidemment pas seule.

Concrètement, cette lutte se concentre sur des produits spécifiques cités dans la Stratégie Nationale, notamment le soja, l’huile de palme et le cacao, qui représentent à eux seuls 80% des importations dit « à risques », à savoir des importations pouvant générer de la déforestation au niveau des pays producteurs. Selon une étude de la Commission européenne réalisée en 2013, les Pays Européens sont responsables de plus du tiers de la déforestation liée au commerce international des produits agricoles.

II.          La déforestation importée dans la SNDI et la loi Climat et résilience

Dans cette lutte, le ministère de la Transition écologique a estimé que la commande publique d’État se devait d’être « exemplaire ». Ainsi, la Stratégie Nationale de 2018 avait prévu un guide pratique de commande publique sans déforestation importée (publié en Novembre 2021) et un objectif une commande publique d’État « zéro déforestation importée » dont la date était alors posée en… 2022.

Mais, mieux vaut tard que jamais, l’été dernier, la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 dit « loi climat et résilience », (dont nous avons eu l’occasion d’étudier les apports en matière de commande publique ici) consacrait son article 272 à instaurer, pour l’État, ce fameux objectif « zéro déforestation importée » :

« l’État se donne pour objectif de ne plus acheter de biens ayant contribué directement à la déforestation, à la dégradation des forêts ou à la dégradation d’écosystèmes naturels en dehors du territoire national. » (article L110-7 Code de l’Environnement (créé par l’article 272 de la loi n° 2021-1104 du 22 Août 2021).

NB : On notera, par rapport à la définition initiale de la notion, la discrète disparition de la mention « indirectement » dans la contribution à la déforestation en dehors du territoire national

Cet article prévoyant son application par décret, c’est ce lundi dernier que celui-ci est paru.

III.        Les dispositions du décret n° 2022-641 du 25 avril 2022

 

Ce décret reprend le principe de l’objectif de « tendre vers des achats de biens qui ne contribuent pas à la déforestation importée » (Article 2), l’appliquant aux pouvoirs adjudicateurs et aux entités adjudicatrices de l’État.

Cet objectif concerne les achats des domaines suivants :

  • les matériaux de construction et de rénovation ;
  • les combustibles ;
  • le mobilier ;
  • les véhicules y compris les équipements ;
  • les fournitures de bureau ;
  • les produits d’entretien ;
  • la restauration

 

Cet objectif se retranscrit concrètement par la mise en place, dès la définition des besoins de l’acheteur et dans le suivi de l’exécution du contrat. À l’aide notamment de la mention d’objectif de sobriété dans la définition des besoins, de dialogue avec les opérateurs, du recours à des certifications et de labels et de mise en place d’évaluations périodiques du suivi du marché. (Article 4)

Pour cela les acheteurs concernés par ces objectifs peuvent se reposer sur le guide « S’engager dans une politique d’achat public zéro déforestation » publié en novembre et la plateforme mise en place en janvier 2021 : www.deforestationimportee.fr

L’application de se concerne les contrats pour lesquels une consultation ou un appel à la concurrence ont été effectués à partir du 26 avril (article 6) et sera évaluée par périodes de cinq ans (Article 5).