Le régime de l’article L. 212-1 du Code de la sécurité intérieure est assez clair :
Sont dissous, par décret en conseil des ministres, toutes les associations ou groupements de fait :
1° Qui provoquent à des manifestations armées ou à des agissements violents à l’encontre des personnes ou des biens ;
2° Ou qui présentent, par leur forme et leur organisation militaires, le caractère de groupes de combat ou de milices privées ;
3° Ou dont l’objet ou l’action tend à porter atteinte à l’intégrité du territoire national ou à attenter par la force à la forme républicaine du Gouvernement ;
4° Ou dont l’activité tend à faire échec aux mesures concernant le rétablissement de la légalité républicaine ;
5° Ou qui ont pour but soit de rassembler des individus ayant fait l’objet de condamnation du chef de collaboration avec l’ennemi, soit d’exalter cette collaboration ;
6° Ou qui, soit provoquent ou contribuent par leurs agissements à la discrimination, à la haine ou à la violence envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur origine, de leur sexe, de leur orientation sexuelle, de leur identité de genre ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation, une prétendue race ou une religion déterminée, soit propagent des idées ou théories tendant à justifier ou encourager cette discrimination, cette haine ou cette violence ;
7° Ou qui se livrent, sur le territoire français ou à partir de ce territoire, à des agissements en vue de provoquer des actes de terrorisme en France ou à l’étranger.
Le maintien ou la reconstitution d’une association ou d’un groupement dissous en application du présent article, ou l’organisation de ce maintien ou de cette reconstitution, ainsi que l’organisation d’un groupe de combat sont réprimées dans les conditions prévues par la section 4 du chapitre Ier du titre III du livre IV du code pénal.
En ces domaines, la jurisprudence abonde (CE, 30/07/2014, 370306 ; CE, 26/01/2018, 407220 ; CE, 26/01/2018, 412312 ; CE, 30/12/2014, 372322 ; CE, 8/9/95, 155161 155162 ; CE, 17/11/2006, 296214 ; CE, Ass., 21/7/70, 76179 76232 puis 76233 puis 76234…).
Récemment, voir
- CE, ord., 3 mai 2021, n° 451743 – Association Génération identitaire
- voir ici notre article : Dissolution de « Génération identitaire » : que dit le Conseil d’Etat ?
La procédure exige là encore une phase de contradictoire dont le juge vérifie le sérieux, mais sur la base d’éléments de preuve où… comment dire… le juge prend en compte les difficultés du travail et d’édification des éléments de preuve (sauf à trahir ses sources…) de l’administration.
Or, voici que l’Etat a dissous une association et que le Conseil d’Etat vient de suspendre cette décision.
Il s’agissait même de deux dissolutions : celle de l’association Comité Action Palestine et celle du groupement de fait Collectif Palestine Vaincra.
On a le droit d’avoir des opinions tranchées mais cela n’entraîne pas la fermeture administrative d’un lieu de culte tant qu’il n’y a pas d’appel à la haine, à la discrimination ou à la violence, posait récemment le Conseil d’Etat :
Et bien là, nous avons la même distinction avec le même effet, trois jours après, dans l’autre domaine qu’est celui de la dissolution d’associations, qui peuvent être radicales tant qu’elles n’appellent pas à la discrimination, à la haine ou à la violence en tant que tel (au titre en tous cas de l’item correspondant de l’article du CSI précité)… le tout combiné avec la distinction (certes fondamentale pour les uns, discutable pour les autres) opérée entre antisionisme d’une part, et antisémitisme, d’autre part, par CEDH, 11 juin 2020, BALDASSI ET AUTRES c. FRANCE, Requêtes nos 15271/16 et 6 autres (voir ici ; notons que l’arrêt lui-même s’avère plus nuancé que le résumé qu’on en fait présentement).
Ajoutons que certains griefs de l’Etat n’étaient pas conformes aux faits révélés par l’instruction.
Combinez l’ensemble, passez au shaker, et vous obtenez cet intéressante décision (CE, ord., 29 avril 2022, n° 462736) :
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