JO de 2024 et urbanisme : 1/ fixation des règles de renvois de balle entre juridictions 2/ carton rouge pour la décroissance

Lundi 17 octobre 2022, le Conseil d’Etat a fixé les règles de renvoi de balle entre juridictions lorsqu’urbanisme rime avec olympisme.

A la condition, justement, que la rime soit riche… et donc que les opérations d’urbanisme et d’aménagement concernées :

  • relèvent du juge administratif, d’une part,
  • et « puissent être regardées, au vu notamment du dossier de candidature de Paris pour ces Jeux, comme étant nécessaires, même pour partie, à la préparation, à l’organisation ou au déroulement de cet événement », d’autre part. 

Au passage, le Conseil d’Etat confirme la position de la CAA de Paris, laquelle avait sur le fond censuré la position « décroissante » du TA de Montreuil, lequel avait estimé qu’il ne faut plus améliorer la desserte des aéroport. Charles de Gaulle Express peut continuer de tracer sa voie. 

 

 

 

Par l’effet du 5° de l’article R. 311-2 du code de justice administrative (CJA), la cour administrative d’appel (CAA) de Paris est compétente en premier et dernier ressort pour connaître, par dérogation aux règles générales fixées par le code de justice administrative quant à la compétence de premier ressort des juridictions administratives de droit commun, de « l’ensemble des litiges relatifs aux opérations d’urbanisme et d’aménagement, aux opérations foncières et immobilières et aux opérations de construction d’infrastructures, d’équipements et de voiries menées en vue des Jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 ».

Mais encore faut-il pour que cet article s’applique, que les opérations litigieuses « puissent être regardées, au vu notamment du dossier de candidature de Paris pour ces Jeux, comme étant nécessaires, même pour partie, à la préparation, à l’organisation ou au déroulement de cet événement »… en sus de relever du juge administratif bien évidemment. 

 

D’où deux décisions du même jour de la Haute Assemblée, témoignant de ce que le juge met la barre assez haut pour apprécier cette nécessité :

  • Non compétence de la CAA de Paris au titre de ce régime pour la ligne de métro n° 17… mais maintien de la compétence de ladite CAA pour des raisons de procédure et donc non censure en cassation à ce titre (non remise en cause d’une attribution d’un litige après renvoi si la juridiction de renvoi ne s’est pas déportée elle-même dans un délai de trois mois).
    Le projet de création de la ligne 17 Nord, qui fait partie du projet d’ensemble du réseau de transports en commun Grand Paris Express, a été conçu afin de contribuer à l’aménagement du Nord de l’Ile-France, d’améliorer la couverture de territoires insuffisamment desservis, de permettre aux populations concernées d’accéder plus aisément aux bassins d’emploi et de réduire la circulation automobile dans la région. Il a été envisagé dès 2009 et a été déclaré d’utilité publique par décret du 14 février 2017, soit après la présentation officielle, le 23 juin 2015, de la candidature de la ville de Paris pour les Jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 mais avant que cette candidature ne soit retenue par le Comité international olympique le 13 septembre 2017. La demande de déclaration d’utilité publique et l’arrêté litigieux du 24 octobre 2018 ne comportaient pas de référence aux Jeux Olympiques et Paralympiques, et n’établissant pas de lien entre le projet et la tenue de cet événement. Si l’existence du projet de la ligne 17 Nord a été mentionnée dans le dossier de candidature, au titre des éléments de contexte relatifs à l’attractivité de Paris, à l’instar d’autres projets d’infrastructures de transports publics, il ne ressort donc pas, selon le juge, de ce dossier de candidature que les autorités françaises se seraient spécifiquement engagées à réaliser cette infrastructure pour les besoins de l’organisation des Jeux. Au surplus, si la livraison de la gare Le Bourget Aéroport aurait pu être utile à la desserte du secteur olympique du Bourget ou si la ligne 17 Nord aurait pu contribuer à la desserte de sites de compétitions sportives ou du village des médias des Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024, ces travaux ne seront pas achevés en 2024. Dans ces conditions, les opérations faisant l’objet des actes attaqués ne peuvent être regardées comme étant nécessaires, même partiellement, à la préparation, à l’organisation ou au déroulement des Jeux Olympiques et Paralympiques de 2024.
    Ceci dit, en vertu des dispositions de l’article R. 351-9 du CJA, la compétence de la juridiction à laquelle une affaire a été transmise en application de l’article R. 351-3, dès lors que cette juridiction n’a pas mis en oeuvre les dispositions de l’article R. 351-6 en renvoyant l’affaire au motif de son incompétence au président de la section du contentieux du Conseil d’Etat dans un délai de trois mois, ne peut plus être remise en cause, sauf à opposer l’incompétence de la juridiction administrative.
    En l’espèce, la cour administrative d’appel de Versailles a, par arrêt du 19 novembre 2020, transmis le dossier de l’affaire à la cour administrative d’appel de Paris en application de l’article R. 351-3 du code de justice administrative, après avoir annulé pour incompétence le jugement rendu en premier ressort par le tribunal administratif de Montreuil. La cour administrative d’appel de Paris n’ayant pas eu recours aux dispositions du deuxième alinéa de l’article R. 351-6, la compétence de cette cour pour statuer en qualité de juge de premier ressort sur la demande initialement présentée au tribunal administratif de Montreuil ne peut plus être remise en cause. .
  • Idem pour la construction d’une gare sur ladite ligne de métro n° 17… mais là avec renvoi au TA compétent puisque les mêmes éléments de procédure ne s’appliquent pas.

 

 

A NOTER : dans la première de ces deux affaires, le juge rejette au fond le pourvoi contre la décision de la CAA de Paris qui avait, elle, censuré la vision « décroissante » du TA de Montreuil, lequel avait estimé qu’il ne faut plus améliorer la desserte des aéroports, schématiquement. Voir :

 

 

Voici ces deux nouvelles décisions :