Fraude pénalement sanctionnée => inexistence de l’acte administratif correspondant => absence de tout droit acquis ensuite de cet acte

Une amusante affaire devant le TA de Marseille concernant des autorisations de stationnement de taxis illustre l’enchaînement suivant :

  • Fraude pénalement sanctionnée
  • => inexistence de l’acte administratif correspondant
  • => absence de tout droit acquis ensuite de cet acte 

 

 

La catégorie des actes dits « inexistants » (CE, 31 mai 1957, Rosan Girard, recp. 335) n’est pas dans nos manuels de depuis administratif depuis 1957 juste pour le folklore. C’est aussi — pour schématiser à outrance — une manière de rendre le pseudo acte attaquable sans délai.

De fait, les actes inexistants seront rares car :

« 2. Un acte ne peut être regardé comme inexistant que s’il est dépourvu d’existence matérielle ou s’il est entaché d’un vice d’une gravité telle qu’il affecte, non seulement sa légalité, mais son existence même.»
(CE, 28 septembre 2016, Anticor, 399173)

Cela dit, le juge trouve parfois des moyens de censurer des actes aux lourdes illégalités via d’autres moyens, comme il le fit pour les actes, pourtant créateurs de droit, obtenus par fraude. Voir :

 

Reste que l’inexistence… existe. Avec un régime contentieux spécifique (non sans limites toutefois ; voir ainsi la possible utilisation du sursis à exécution d’un tel acte : Conseil d’État, 29 décembre 2022, n° 463598, aux tables du recueil Lebon).

Une affaire jugée par le TA de Marseille illustre ce régime.

La titulaire d’une licence de taxi avait demandé à la commune une seconde  autorisation de stationnement, ce qui a été accepté par le maire en dépit de l’avis défavorable émis par la commission départementale des taxis et des voitures de petite remise. Il en a résulté des arrêtés frauduleux, notamment antidatés.

 

Le maire a été condamné à une amende pour avoir falsifié les arrêtés correspondants (précisons qu’en matière de faux en écriture publique la correctionnalisation n’est pas possible, ce qui interroge en l’espèce, mais passons… c’est un autre sujet. Il faudrait avoir le jugement pénal pour apprécier précisément la qualification retenue).

Les arrêtés sont donc considérés par le juge comme inexistants, au delà d’une simple illégalité. Il en constate donc la nullité, conduisant notamment à ce que de ces actes nul droit acquis ne peut être né :

« Ainsi, le maire ayant volontairement octroyé à Mme A un avantage indu en détournant l’application des dispositions précitées du code des transports de leur objet, les deux arrêtés datés du 25 septembre 2014 sont entachés d’un vice d’une gravité telle qu’il affecte non seulement leur légalité mais leur existence même. Dans ces conditions, ces arrêtés constituent des actes nuls et de nul effet pouvant être contestés devant le juge de l’excès de pouvoir sans condition de délai, […].»

De plus, le refus de retirer ces actes (qui n’en sont donc pas… vous me suivez  ?) est illégal.

Source :

TA Marseille, 9e ch., 11 oct. 2022, n° 1910188.