Un terrain situé à côté d’un lotissement le long du littoral est-il constructible ?

Afin de protéger le territoire des communes situé le long du littoral, l’article L. 121-8 du Code de l’urbanisme pose une règle de principe selon laquelle “L’extension de l’urbanisation se réalise en continuité avec les agglomérations et villages existants“.

Toute la difficulté consiste alors à déterminer quand une parcelle sur laquelle est envisagée  une opération de construction peut être considérée comme étant située en continuité avec une agglomération ou un village existants.

Cette question s’est notamment posée à propos de la légalité d’un permis de construire délivré par le maire de la commune de Roquebrune-sur-Argens et qui autorisait la réalisation d’un immeuble de 46 logements sur un terrain situé à côté d’un lotissement, mais éloigné du centre historique du village.

Pour la Cour administrative d’appel de Marseille, un tel permis doit être jugé comme étant illégal au motif qu’un lotissement ne peut être considéré comme caractérisant une agglomération ou un village existans au sens de l’article L. 121-8 du Code de l’urbanisme.

Mal lui en a pris car le Conseil d’Etat vient de censurer un tel raisonnement au motif que la nature juridique de l’opération qui est à l’origine de la présence de constructions ne constitue pas un critère permettant de déterminer si la condition requise par l’article L. 121-8 précitée est remplie :

“Aux termes de l’article L. 121-8 du code de l’urbanisme, dans sa rédaction applicable au litige, antérieure à la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, dans les communes littorales : ” L’extension de l’urbanisation se réalise soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l’environnement. ” Il résulte de ces dispositions que les constructions peuvent être autorisées dans les communes littorales en continuité avec les secteurs déjà urbanisés caractérisés par un nombre et une densité significatifs de constructions, mais qu’aucune construction ne peut en revanche être autorisée, même en continuité avec d’autres constructions, dans les espaces d’urbanisation diffuse éloignées de ces agglomérations et villages. La nature de l’opération foncière ayant présidé à la création d’un secteur est sans incidence pour apprécier s’il caractérise une agglomération ou un village existant au sens de l’article L. 121-8 du code de l’urbanisme. Un projet de construction situé en continuité avec un secteur urbanisé issu d’une opération de lotissement peut, ainsi, être autorisé si le nombre et la densité des constructions de ce lotissement sont suffisamment significatifs pour qu’il caractérise une agglomération ou un village existant au sens de l’article L. 121-8″.

En zone littorale, un projet prévu sur un terrain situé à côté d’une zone abritant déjà un nombre et une densité de constructions significatifs peut donc être autorisé, peu importe la nature juridique de ces constructions et leur éventuel éloignement avec le centre urbain de la commune  :

“Il résulte de ce qui a été dit au point précédent que la cour, à laquelle il incombait seulement de rechercher si le nombre et la densité des constructions du secteur en continuité duquel se situait le projet étaient suffisamment significatifs, a commis une erreur de droit en prenant en considération la nature de l’opération foncière ayant présidé à la création de ce secteur et en jugeant à ce titre qu’un ” lotissement ” ne pouvait constituer une agglomération ou un village existant au sens de l’article L. 121-8 du code de l’urbanisme, de même, au demeurant, qu’en prenant en considération l’éloignement de ce secteur par rapport au centre historique de la commune, situé dans un autre secteur urbanisé”.

Ref. : CE, 12 juin 2023, Société Bouygues Immobilier, req., n° 459918. Pour lire l’arrêt, cliquer ici