Domaine public sous terrain privé, eaux pluviales causant des dommages imputés à la commune mais entraînant la responsabilité de l’EPCI à fiscalité propre… l’affaire des “eaux du Louche”, où le juge finit par voir clair, ne manquera pas d’abreuver ceux qui aiment les eaux troubles du droit.
Cet arrêt en matière de travaux publics, intéressant mais classique sur les distinctions entre divers types de dommages, ne manque pas en effet d’intérêt sur deux points un peu moins classiques :
- cet arrêt qualifie de réseau public d’eaux pluviales un ouvrage fait au XIXème siècle par des propriétaires privés.Voir « 7. Les biens immeubles résultant d’un aménagement, qui sont directement affectés à un service public, y compris s’ils appartiennent à une personne privée, présentent le caractère d’ouvrage public. La mise en jeu de la responsabilité sans faute d’une collectivité publique à l’égard d’un justiciable qui est tiers par rapport à un ouvrage public ou une opération de travaux publics est subordonnée à la démonstration par cet administré de l’existence d’un dommage anormal et spécial et d’un lien de causalité entre cet ouvrage ou cette opération et les dommages subis. Les personnes mises en cause doivent alors, pour dégager leur responsabilité, établir que le dommage est imputable à la faute de la victime ou à un cas de force majeure, sans que puisse utilement être invoqué le fait du tiers.
8. […] le ru du Louche est un cours d’eau non domanial dont, en vertu de l’article L. 215-2 du code de l’environnement, le lit appartient aux propriétaires des deux rives. Ce ru coulait entièrement à l’air libre pour se jeter dans la Marne avant de faire l’objet, au 19ème siècle, à l’initiative de l’un des propriétaires des terrains traversés, d’une couverture […]. Cet ouvrage, qui grève le tréfonds d’une des parcelles […] appartenant à Mme D…, et qui fait l’objet d’une servitude de passage, passait sous la rue du Général de Gaulle, se poursuivait en aval, mais a été détruit pour cette partie située à l’est de cette voie publique. […] - il estime que la communauté de communes est responsable du fait du transfert de la compétence eaux pluviales alors même que c’était la commune qui était mise en cause par la partie adverse.Cela dit, le litige ayant été déclenché au contentieux après l’intercommunalisation de cette compétence, la dévolution de ce litige à l’intercommunalité ne faisait guère de doute. Les expertises furent antérieures à l’intercommunalisation de la compétence, mais non le contentieux lui-même. Et cet arrêt est intéressant sur les modalités de la bascule de l’un vers l’autre.Voir à ce sujet :
- Intercommunalité : transfère-t-on les contentieux ? [MINI VIDEO]
- CE, 14 mars 1986, Communauté urbaine de Lyon, req. n° 60034, Rec. p. 71. CAA Marseille, 9 juin 2011, n° 08MA03059. Voir a contrario si le contentieux est déposé avant l’intercommunalisation : CE, 3 décembre 2014, Citelum, n° 383865, publié aux Tables du Rec.).
CAA Paris, 13 mai 2019, CCPMF, n°18PA03629 et 18PA03637 :