Un rapporteur public indique avant l’audience, en ligne, sur Telerecours (et Sagace), le sens de ses futures conclusions. Si, ensuite, il envisage de modifier sa position, il doit, à peine d’irrégularité de la décision, mettre les parties à même de connaître ce changement.
Sources : CE, Section, 21 juin 2013, Communauté d’agglomération du pays de Martigues, n° 352427, rec. p. 167 ; CE, 30 mai 2016, Mme , n° 381274, rec. T. pp. 802-806-890 ; CE, 5 mai 2006, Société Mullerhof, n° 259957, rec. p. 232. Pour des illustrations récentes et intéressantes, voir : CE, 10 février 2020, n° 427282 [voir notre article : le sens des conclusions du rapporteur public ne peut être trop flou ] ; CE, 4 mai 2016, 380548 [cf. aussi, toujours sur notre blog : le rapporteur public doit informer les parties s’il change le sens de ses conclusions ]).
Or, dans une affaire, un rapporteur public avait indiqué, avant l’audience, sur Telerecours qu’il concluait à un « rejet au fond ». Mais à l’oral, à l’audience, il a précisé que, selon lui, que la requête pourrait également être rejetée en raison de son irrecevabilité.
Une irrecevabilité… ce n’est pas « un rejet au fond ».
Par conséquent, cette irrecevabilité en sus du rejet au fond… aurait-elle due être mentionnée en ligne avec le sens des conclusions, voire donner lieu à une précision a postériori avec indication de cette mention aux parties, pour que celles–ci puissent renforcer leurs arguments sur ce point précis ?
Une vision stricte des exigences du contradictoire devrait conduire à une réponse positive à cette question.
Mais, par commodité, par souci de ne pas imposer trop de précisions dans le sens des conclusions mis en ligne, ou tout autre préoccupation (qui vont agacer beaucoup d’avocats mais qu’en réalité nous pouvons comprendre me semble-t-il… le rapporteur public doit de toute manière tout examiner s’il est sérieux et il ne va pas tout résumer sur Telerecours… et c’est aux avocats de venir préparés à l’audience), il a plu au Conseil d’Etat, hier, de répondre négativement à cette question.
NB : bien sûr, le raisonnement ne serait pas le même s’il s’agissait d’un moyen (MOP) soulevé d’office sans annonce préalable !
Citons sur ce point un extrait du résumé de la base Ariane, qui préfigure celui des tables du rec. :
« Dès lors que ces considérations supplémentaires n’ont ni contredit, ni modifié le sens des conclusions qui avait été communiqué aux parties dans les conditions prévues par l’article R. 711-3 du code de justice administrative (CJA), la circonstance que le rapporteur public ait, en l’espèce, non seulement conclu au rejet au fond, mais encore indiqué que la demande pourrait être rejetée en raison de son irrecevabilité est sans incidence sur la régularité du jugement. »
Source : CE, 29 juin 2021, n° 442506, à mentionner aux tables du recueil Lebon
ATTENTION : cet arrêt a aussi un intérêt sur un tout autre sujet : celui de la TVA en matière de marchés publics. Voir :