Après expiration d’une concession, le maire ne peut refuser l’exhumation de corps déposés dans un ossuaire que pour un motif de police administrative, selon un TA, contredisant sur ce point la position de l’Etat et une pratique fréquente dans les communes.
Le régime des fins de concessions funéraires est prévu par divers articles du CGCT :
- l’article L. 2223-15 de ce code prévoit le régime des concessions et de leur renouvellement.
- son article L. 2223-4 prévoit un aménagé où les restes exhumés en fin de concession « sont aussitôt réinhumés. Le maire peut également faire procéder à la crémation des restes exhumés en l’absence d’opposition connue ou attestée du défunt. Les restes des personnes qui avaient manifesté leur opposition à la crémation sont distingués au sein de l’ossuaire ».
- l’article R. 2213-40 de ce code, enfin, dispose que « Toute demande d’exhumation est faite par le plus proche parent de la personne défunte. Celui-ci justifie de son état civil, de son domicile et de la qualité en vertu de laquelle il formule sa demande. L’autorisation d’exhumer un corps est délivrée par le maire de la commune où doit avoir lieu l’exhumation. L’exhumation est faite en présence d’un parent ou d’un mandataire de la famille. Si le parent ou le mandataire dûment avisé n’est pas présent à l’heure indiquée, l’opération n’a pas lieu ».
- quand les restes des défunts doivent être exhumés, ils réunis dans un cercueil de dimensions appropriées, conformément aux dispositions de l’article R. 2223-20 du CGCT, et inhumés de nouveau sans délai dans un lieu définitivement affecté à cet usage.

Sur cette base, les services de l’Etat ont estimé (la mise en gras et souligné étant bien sûr de nous) qu’il :
« […] existe trois hypothèses dans lesquelles, une fois l’exhumation réalisée, les restes mortels sont déposés à l’ossuaire. Il s’agit de la reprise des sépultures en terrain commun, au terme du délai de rotation et de la reprise des concessions funéraires soit parvenues à échéance et non renouvelées dans un délai de deux ans, soit à l’achèvement d’une procédure de constatation d’« état d’abandon ». Lorsqu’un corps est inhumé dans une sépulture en terrain commun, le plus proche parent du défunt peut à tout moment en demander l’exhumation en vue d’une réinhumation dans un emplacement concédé, évitant ainsi le placement d’office à l’ossuaire au terme du délai de rotation. S’agissant de la reprise des concessions parvenues à échéance, la famille dispose d’un droit à renouvellement pendant deux années, auquel le maire ne peut s’opposer. Enfin, la procédure de constatation d’état d’abandon s’étale sur une durée minimum de trois années qui donnent plusieurs occasions à la famille de faire obstacle à l’exhumation des restes mortels. Dans ces conditions, il y a lieu de considérer que le placement à l’ossuaire est définitif. Dès cet instant, les restes mortels sont placés sous la responsabilité de la commune et la famille ne peut donc plus en disposer. En conséquence, le maire ne peut pas délivrer d’autorisation d’exhumation pour extraire des ossements, même individualisés, de l’ossuaire. »
Un maire a appliqué à la lettre cette interprétation des services de l’Etat.
Cette position a été censurée par le TA de Nantes. Ce tribunal :
- estime qu’il ne résulte pas de ces dispositions que les restes transférés vers l’ossuaire doivent être individualisés (ce qui rend difficile la restitution !?)
- que le maire aurait eu tort de se croire en situation de compétence liée en se fondant sur cette réponse ministérielle
- et, surtout, que le maire ne pouvait refuser l’exhumation de corps déposés dans un ossuaire que pour un motif de police administrative, tel que la salubrité publique ou la décence dans les cimetières.
La décision du maire a ainsi été annulée et il lui a été enjoint de réexaminer la demande d’exhumation présentée par la famille.
Source : TA Nantes, 17 novembre 2021, n°1908347
Voir en sens contraire : TA Paris, 4 mai 2017, n°1608066/4-3. Voir ici.
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