Le maire mis en cause pour des faits de harcèlement moral ne peut statuer sur la demande de protection fonctionnelle présentée par l’agent concerné.

Par un arrêt M. B… c/ commune d’Hirson en date du 3 février 2022 (req. n° 20DA02055), la cour administrative d’appel de Douai a considéré que le maire d’une commune ne peut légalement statuer sur une demande de protection fonctionnelle d’un agent communal pour des faits qui le mettent personnellement en cause. Il doit alors se considérer comme empêché au sens de l’article L. 2122-17 du code général des collectivités territoriales (CGCT) et transmettre la demande à l’un de ses adjoints ou à l’un des conseillers municipaux.

En l’espèce, M B… a été recruté comme technicien principal territorial par la commune d’Hirson en 2010. Par un courrier du 2 juillet 2018, il a demandé au maire d’Hirson de lui accorder la protection fonctionnelle à raison de faits de harcèlement moral dont il estimait être victime, notamment de la part du maire lui-même, dans le cadre de ses fonctions. Cette demande ayant fait l’objet d’une décision implicite de rejet. M. B… a saisi le tribunal administratif d’Amiens qui a cependant, par un jugement du 4 novembre 2020, rejeté sa demande tendant à l’annulation de cette décision implicite. Il a alors interjeté appel de ce jugement.

Après avoir rappelé les dispositions de l’article 11 de la loi du 13 juillet 1983 relatives à la protection fonctionnelle des agents publics, la cour administrative d’appel de Douai a considéré qu’il « résulte du principe d’impartialité que le supérieur hiérarchique mis en cause à raison de tels actes ne peut régulièrement, quand bien même il serait en principe l’autorité compétente pour prendre une telle décision, statuer sur la demande de protection fonctionnelle présentée pour ce motif par son subordonné. »

Puis, précise la cour, le maire, qui n’aurait pas délégué la fonction afférente sur le fondement de l’article L. 2122-18 du CGCT, « est en principe compétent pour se prononcer sur une demande de protection fonctionnelle émanant des agents de sa commune. Toutefois, face à une telle demande qui viserait des faits de harcèlement moral le concernant personnellement et qui comporterait les éléments de fait susceptibles de faire présumer l’existence d’un harcèlement […] il se trouve en situation de ne pouvoir se prononcer sans méconnaître les exigences qui découlent du principe d’impartialité, et il lui appartient […] de transmettre celle-ci à l’un de ses adjoints ou à l’un des conseillers municipaux dans les conditions prévues à l’article L. 2122-17 du même code. »

Dans ces conditions, conclut la cour, « le maire d’Hirson ne pouvait légalement, sans manquer à l’impartialité, se prononcer lui-même sur la demande de protection fonctionnelle de M. B…. Le caractère implicite de la décision contestée est sans incidence sur ce point, contrairement à ce que soutient la commune d’Hirson, dès lors que cette décision est réputée avoir été prise par le maire auquel elle a été adressée, lequel n’établit, ni même n’allègue, avoir transmis la demande présentée par M. B… à l’un de ses adjoints ou, à défaut, à l’un des conseillers municipaux […] Enfin, les circonstances que l’adjointe au maire chargée de l’administration générale et des services ne disposait pas d’une délégation de fonction en bonne et due forme et que le directeur général des services était également mis en cause par M. B… ne faisaient pas obstacle à ce que la demande de protection fonctionnelle transmise par ce dernier soit examinée par un autre adjoint ou, à défaut, un conseiller municipal » sur le fondement de l’article L. 2122-17 du CGCT.

Cet arrêt peut être consulté à partir du lien suivant :

https://www.legifrance.gouv.fr/ceta/id/CETATEXT000045140488?juridiction=CONSEIL_ETAT&juridiction=COURS_APPEL&juridiction=TRIBUNAL_ADMINISTATIF&juridiction=TRIBUNAL_CONFLIT&page=1&pageSize=10&query=20DA02055&searchField=ALL&searchType=ALL&sortValue=DATE_DESC&tab_selection=cetat