Le Ministère de l’Économie, des Finances et de la Relance a publié un guide pratique au profit des petites et moyennes entreprises (TPE/PME) tendant à les accompagner dans le développement de leurs stratégies commerciales afin de leur permettre d’accéder aux marchés publics.
Pour y accéder :
Depuis longtemps, les politiques publiques essayent de soutenir l’accès des TPE/PME à la commande publique. En effet, ces entreprises peuvent rencontrer des difficultés pour mettre en avant leurs compétences en matière de performance environnementale et sociale, d’innovation et de la qualité de service proposée.
Ainsi, ce guide pratique a vocation de mettre en perspective les grandes étapes que doivent suivre les TPE/PME dans leurs stratégies commerciales afin d’optimiser leurs chances d’obtenir l’attribution de marchés publics.
1ère étape : Les TPE/PME doivent faire connaître et mettre en avant leurs compétences et savoir-faire au profit des acheteurs publics (État, collectivités territoriales, établissements publics) :
Ce guide pratique souligne l’importance pour les TPE/PME d’apprivoiser l’environnement de l’achat public et plus spécifiquement l’organisation de la structure publique afin d’accroître leur développement économique au travers des marchés publics.
Premièrement, les TPE/PME doivent prendre contact avec les acheteurs publics en participant à la phase préalable dite du « sourcing » :
Dans certains cas, les acheteurs publics sont confrontés à des difficultés pour définir avec précision les caractéristiques et l’étendue de leurs besoins. Ainsi, préalablement au lancement d’une procédure de passation d’un marché public, ces derniers mettent en place un travail préparatoire appelé « sourcing » définit à l’article R. 2111-1 du code de la commande publique (CCP). En ce sens, le sourcing permet aux acheteurs publics de recourir aux conseils des entreprises en sollicitant leurs avis, en les informant de leurs projets et de leurs exigences, en mettant en place la réalisation d’études de marché ou de consultations.
Ainsi, il est primordial pour les TPE/PME d’accéder à ces travaux préparatoires afin non seulement de comprendre les attentes des acheteurs publics mais également de pouvoir détailler et expliquer notamment leurs-savoir-faire, leurs pratiques tarifaires, leurs modalités de traitement des commandes, leurs modalités de délais de livraisons etc.
A ce titre, ce guide pratique apporte d’intéressantes précisions sur les démarches que doivent entreprendre les TPE/PME pour maximiser leurs chances d’accéder à ces sourcing.
Ces entreprises doivent définir leur périmètre géographique d’intervention, leurs spécificités sectorielles, analyser et prendre connaissance des programmations provisionnelles des achats publiées par les acheteurs publics (ex: la Programmation des achats de l’Etat 2020-2023) faire connaître leur entreprise par l’intermédiaire des fédérations professionnelles de leur secteur d’activité, des organisations interprofessionnelles, des réseaux consulaires à savoir les Chambres d’Agriculture, les Chambres de Métiers et de l’Artisanat, les Chambres de Commerce et d’Industrie. De même, ces entreprises doivent se faire référencer auprès des centrales d’achat (l’Union des groupements d’achat public (UGAP), l’Union des hôpitaux pour les achats (UniHa) ou le Réseau des acheteurs hospitaliers (ResaH) pour le secteur hospitalier) ou bien remplir le formulaire proposé par le guichet unique des achats de l’Etat afin d’être mise en être mise en contact directe avec les acheteurs.
Dès lors, en multipliant leurs sources de prise de contact avec les acheteurs publics, les TPE/PME auront automatiquement plus de visibilités sur les achats programmés.
De même, ces entreprises pourront être contactées par les acheteurs publics dans le cas où leurs achats sont inférieurs au seuil de publicité et de mise en concurrence (40 000 euros HT pour les marchés de fournitures et les marchés de services ; pour les marchés de travaux, le seuil a été relevé à 100 000 euros HT jusqu’au 31 décembre 2022) pour lesquels ils n’ont pas l’obligation de recourir à la mise en place de publicité et de mise en concurrence préalable mais uniquement de choisir l’offre la plus pertinente (prise de contact avec différentes entreprises en veillant à la bonne utilisation des deniers publics).
Secondement, les TPE/PME doivent mettre en place une veille personnalisée afin derecenser et de consulter les appels d’offres relevant spécifiquement de leurs domaines d’activités :
Comme le précise ce guide, les acheteurs publics doivent obligatoirement recourir à procédure de publication et une mise en concurrence préalable lorsque leurs achats dépassent les seuils précédemment indiqués.
- Une publication sur le bulletin officiel des annonces des marchés publics (BOAMP) lorsque les marchés sont d’un montant supérieur à 90 000 euros HT;
- Une publication sur le Journal officiel de l’Union européenne (JOUE) lorsque les marchés publics sont d’un montant supérieur au « seuils européens » allant de 139 000 euros HT pour les marchés de l’Etat concernant les fournitures et les services à 5 350 000 euros HT concernant les marchés de travaux ;
- Une publication dans les journaux d’annonces légales dont la liste officielle est régulièrement mise à jour sur les sites internet des préfectures).
Afin, ce guide retrace l’ensemble des plateformes sur lesquelles les TPE/PME peuvent consulter ces procédures sur la plateforme des achats de l’Etat « Place » ainsi que celles utilisées spécifiquement par les régions (liens accessibles en pages 12 et 13 du guide).
Troisièmement, les TPE/PME peuvent accéder aux marchés publics en recourant au groupement momentané d’entreprises (GME) et à la sous-traitance :
Dans certains cas, les TPE/PME peuvent rencontrer des difficultés pour présenter leur offre seule à un marché public. Toutefois, ce guide détaille les alternatives et solutions que peuvent mettre en place ces entreprises pour présenter tout de même leurs offres.
La première alternative consiste au recours aux GME qui permet à plusieurs entreprises de proposer une offre commune dans le cadre d’une procédure de passation d’un marché public en mettant en commun leurs compétences. Dans ce cadre, elles sont représentées par un mandataire et peuvent décider que leur GME soit conjoint (chaque membre ne s’engage que pour la partie qu’il exécute) ou bien qu’il soit solidaire (chaque membre est solidairement engagé et doit pallier les défaillances des autres membres en cas d’inexécution de leurs prestations).
La deuxième alternative concerne le recours à la sous-traitance. Certes, les entreprises ne sont pas attributaires du marché public mais elles participent à son exécution en réalisant les prestations qui leurs sont dévolues par l’attributaire et non par l’acheteur public (absence de lien contractuel avec ce dernier). Pour se faire, leur sous-traitance devra faire l’objet d’une déclaration auprès de l’acheteur public par l’intermédiaire d’un formulaire spécifique le « DC4 ».
2ème étape : Les TPE/PME doivent s’assurer de formuler une offre personnalisée afin d’accroître leurs chances d’obtenir un marché public :
Premièrement, ces entreprises doivent avoir une analyse attentive des critères de sélection des offres formulés par les acheteurs publics :
En effet, le prix n’est pas l’unique critère de sélection des offres sur lequel se fonde les acheteurs publics. En ce sens, le guide met en garde les TPE et PME sur l’importance des critères de sélection formulés par les acheteurs publics dans leurs règlements de consultation sur lesquels ils analysent et notent les offres des entreprises.
Ces critères sont définis à l’article R2152-7 du CCP et regroupent une multitude de catégories à savoir notamment le prix, le coût du cycle de vie, la qualité du produit ou service proposé, les délais d’exécution, les performances de l’offre en matière environnementale ainsi que les actions sociales que s’engagent de mettre en œuvre l’entreprise.
Ainsi, les TPE et PME doivent s’assurer que leurs offres répondent parfaitement à l’ensemble des critères formulés par les acheteurs publics.
Toutefois, la vigilance des TPE et PME ne doit pas se cantonner à ces critères de sélection qui doivent être non-discriminatoires, objectifs, précis et liés exclusivement à l’objet du marché ou à ses conditions d’exécution. En effet, comme l’indique le guide, ces critères se distinguent des clauses d’exécution du marché qui ne sont pas comprises dans l’évaluation des offres mais qui formulent les exigences spécifiques liées à l’exécution du marché auxquelles devra se soumettre l’attributaire. Ainsi, ce guide attire l’attention des TPE et PME sur ces clauses qui sont étroitement liées aux critères d’attribution (les acheteurs publics peuvent mesurer la capacité des candidats à les respecter au regard des éléments qu’elles ont communiqués par rapport aux critères d’attribution).
Enfin, comme le souligne ce guide, les TPE et PME ont la possibilité de présenter une offre distincte de la solution attendue par les acheteurs publics. Il s’agit du cas spécifique des variantes. Ces variantes définies correspondent à la situation où les acheteurs publics exigent que les offres des entreprises proposent un procédé d’exécution différent que celui fixé dans le cahier des charges. Toutefois, un tel recours est strictement limité et précisé à l’article R2151-8 du CPP (Par exemple, les variantes sont par principe interdites dans un marché passé par un pouvoir adjudicateur sauf mention contraire dans l’avis de marché)
Secondement, les TPE et PME doivent répondre en priorité à des appels offres ciblés en lien avec leurs champs de compétences et leurs secteurs d’activités :
Les témoignages recensés dans ce guide mettent en lumière le travail que suscite la présentation d’une candidature à un marché public notamment en termes de temps et d’investissement pour les entreprises.
En ce sens, le guide recommande aux TPE et PME de cibler leurs candidatures sur certains marchés publics pour lesquels elles ont des chances dans obtenir l’attribution. Ainsi, les TPE et PME doivent formuler une offre personnalisée répondant spécifiquement au besoin exprimé par les acheteurs publics. Ainsi, le guide recense deux facteurs à prendre en considération à savoir le périmètre géographique et analyser les critères d’attributions définis afin de s’assurer qu’ils relèvent de leur champ d’expertise.
3ème étape : Les TPE et PME doivent se démarquer en valorisant la compétitive hors-prix de leurs offres :
Premièrement, les TPE et PME doivent être vigilantes sur l’impact environnemental des offres présentées aux acheteurs publics :
Comme le souligne le guide, les acheteurs publics sont de plus en plus amenés à prendre en compte l’impact environnemental des offres des candidats (article 35 de la loi climat et résilience du 22 août 2021 imposant au plus tard en 2026 aux acheteurs publics de retenir notamment un critère d’attribution concernant sur les caractéristiques environnementales de l’offre).
Cette prise en compte des caractéristiques environnementales des offres qui doit être en lien direct avec l’objet du marché ou ses conditions d’exécution recouvre une multitude d’éléments. En ce sens, les acheteurs publics peuvent notamment :
- Imposer la détention d’un label, un écolable ou un équivalent (ex : une certification NF Environnement, un label Agriculture biologique, un certificat Oeko-Tex pour les produits textiles) ;
- Prendre en compte les modalités de traitement des déchets des entreprises ;
- Prendre en compte le cycle de vie d’un produit, d’un service ou d’un ouvrage ;
- Analyser le bilan carbone généré lors de la fabrication d’un produit ;
- Imposer pour les marchés de fournitures des biens issus du réemploi ou de la réutilisation ou comportant des matières recyclées.
Pour cette raison, ce guide insiste sur le fait que ces TPE et PME doivent parfaitement démontrer qu’elles répondent spécifiquement aux exigences formulées concernant les critères environnementaux retenus par les acheteurs publics. En ce sens, elles doivent démontrer l’implication de leur entreprise en matière environnementale (ex : proposer aux acheteurs publics des fournitures issus de l’économie circulaire, détenir des labels ou écolabel, préciser le mode de traitement des déchets de leur entreprise, proposer d’établir une charte environnementale afin de limiter l’impact environnemental du marché public).
Secondement, les TPE et PME doivent être vigilantes concernant leur implication sociale :
Ce guide recommande également aux TPE et PME de valoriser leur offre au regard de leur implication sociale. En effet, les acheteurs publics peuvent inclure des critères à caractère social dans la sélection des offres des candidats (ex : Conditions de travail, l’insertion professionnelle des personnes en difficulté).
Par ailleurs, en vertu de l’article 35 de la loi climat et résilience du 22 août 2021,l’implication sociale des entreprises devra au plus en 2026 être prise en compte par les acheteurs publics dans les conditions d’exécution de leurs marchés publics qui seront supérieurs aux seuils européens.
A ce titre, le guide donne des exemples en termes d’implication sociale dans le cadre de l’exécution d’un marché public qui peuvent correspondre à la mise en œuvre :
- D’actions en termes d’insertion des publics en difficulté (ex : clause spécifique dans les marchés publics visant à imposer la réalisation d’un nombre défini d’heures d’insertion professionnelle ;
- D’efforts en termes de formation et d’apprentissage (ex : les formations professionnelles proposées par les entreprises, recrutement d’apprentis)
- De mesures visant au respect des droits humains liées (ex : conformité avec les normes sociales de l’Organisation internationale du travail (OIT).
A ce titre, ce guide souligne l’importance pour les TPE et PME de demander conseil auprès de professionnels du domaine social (un facilitateur ou des acteurs de l’insertion et du handicap) lorsque les acheteurs publics prévoient une clause d’insertion sociale dans l’exécution d’un marché public.
Ainsi, ce guide recommande aux PME et TPE d’anticiper ces mesures en termes d’implication sociale et de ne pas attendre de soumissionner à un marché public pour les mettre en œuvre. A ce titre, ces entreprises peuvent dès à présent mettre en pratique une politique sociale au sein de leur entreprise en recrutant par exemple des personnes éligibles au dispositif d’insertion. De même, ce guide recommande aux PME et TPE de valoriser leurs engagements en termes de responsabilité sociale mise en place au sein de leur entreprise (ex. recrutement de personnes handicapées et valorisation de l’emploi local )
Troisièmement, les PME et TPE doivent mettre en avant la qualité de leurs produits et services proposés :
En effet, afin de se démarquer, les PME et TPE doivent mettre en avant la qualité des produits ou prestations proposées aux acheteurs publics (ex : leurs qualifications et références).
Le guide souligne la prise en compte par les acheteurs publics d’une part, de la qualité intrinsèque des offres (ex : les conditions de production, processus de fabrication, les normes de sécurité utilisées et la durabilité du produit) et, d’autre part, la qualité des services proposés (ex : les conditions de service après-vente, disponibilité des entreprises d’établir un service rapide d’intervention, la prise en compte de la cyber-sécurité). Dès lors, il est primordial pour ces entreprises de disposer de certifications et d’accréditations et de mettre en avant leur implantation locale.
Quatrièmement, les PME et TPE doivent de démontrer le caractère innovant de leur offre :
Les acheteurs publics ont la possibilité d’établir un critère d’attribution concernant le caractère innovant des offres des entreprises définit à l’article L2172-3 du CCP. Cet article prévoit une définition assez large du caractère innovation d’une offre laissant ainsi une certaine souplesse dans sa prise en considération par les acheteurs publics.
En ce sens, les offres des candidats peuvent être évaluées au regard notamment de leur capacité à proposer la réalisation de prestations nouvelles ou sensiblement améliorées, de mettre en œuvre de nouveaux procédés de production ou de construction, de méthode de commercialisation.
Dans ces conditions, plusieurs éléments peuvent permettre aux acheteurs publics d’apprécier le caractère innovant d’une offre (ex : l’existence ou non de la solution sur le marché, l’intégration de la solution à un écosystème de l’innovation, le niveau de risque associé à l’innovation, l’utilisation de matériaux bio-sourcés). Comme le souligne ce guide, deux dispositifs spécifiques en termes d’achat d’offres innovantes sont prévus (le partenariat d’innovation prévu à l’article L. 2172-3 du CCP et le dispositif achats innovants prévu à l’article R.2122-9-1 de ce même code).
Ainsi, il est recommandé aux PME et TPE de démontrer leur capacité à améliorer l’offre de leurs services et produits afin de s’assurer de répondre et de s’adapter aux attentes formulées par les acheteurs publics. A ce titre, certaines plateformes mettent en relation les acheteurs publics avec des entreprises innovantes (plateforme européenne « Procurement of innovation platform », plateforme « des achats d’innovation » ainsi que la plateforme « GrandTesteur | Expérimenter pour accélérer les transitions »).
*article écrit avec la collaboration de Lucie Santini, stagiaire EFB