Le Conseil d’Etat vient de rendre une décision importante sur l’office du juge d’appel. Si un jugement de 1e instance est annulable pour faute de réponse à un moyen, cette irrégularité n’affecte que la partie correspondante du jugement, si celle-ci est divisible. Il en résulte que la partie du jugement non affectée par cette irrégularité ne peut être annulée pour ce seul motif (celui de la faute de réponse à un moyen) ni même être examinée par la voie de l’évocation.
Une Cour administrative d’appel, dans une affaire d’urbanisme concernant le PLU de la commune de Biscarosse, avait retenu que le tribunal administratif avait insuffisamment motivé son jugement en s’abstenant de répondre à un moyen.
Cette cour en avait déduit que le jugement devait être annulé dans toute la mesure où il avait rejeté les conclusions à fin d’annulation présentées en première instance, puis cette cour avait statué sur l’ensemble de ces conclusions par la voie de l’évocation, notamment sur celles concernant une partie de la décision divisible du reste de la décision attaquée et non concernée par l’insuffisance de motivation du jugement.
C’est cette solution consistant à débobiner tout le jugement en tirant sur un seul moyen qui est censurée par le Conseil d’Etat. Ce dernier pose que :
- que l’insuffisance de motivation dans le jugement du TA, retenue par la CAA, n’avait pas pour effet d’entacher d’irrégularité l’ensemble du jugement de première instance, mais n’affectait la régularité que de la seule partie divisible de ce jugement statuant sur les conclusions au soutien desquelles avait été soulevé le moyen demeuré sans réponse.
- qu’il en résulte que, dès lors que cette insuffisance de motivation était sans portée sur une partie de la décision attaquée, divisible du reste de cette décision, la CAA ne pouvait, pour ce motif :
- ni annuler comme irrégulier le jugement de première instance en tant qu’il statuait sur cette partie de la décision.
- ni par suite, statuer sur cette partie du litige par la voie de l’évocation.
Et, dès lors (mais c’était ballot…) qu’aucun moyen n’avait été présenté en appel contre l’autre partie de la décision attaquée, il n’y avait pas lieu, après cassation de cette partie de l’arrêt attaqué, de renvoyer l’affaire sur ce point à la cour.
Ceci dit, ne pas attaquer chaque moyen (au moins ceux un peu solides) à hauteur d’appel pour un appelant c’est vraiment vouloir faire le bonheur de la partie intimée…
Source :
Conseil d’État, 7 novembre 2022, n° 461418, aux tables du recueil Lebon
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