Vêtements parlementaires : comparons l’ancienne et la nouvelle version de l’article 9 de l’Instruction générale du Bureau de l’Assemblée Nationale

Crédits photographiques : David Mark (sur Pixabay) ; cadrage modifié.

Les uns se demanderont si l’habit fait-il le Parlementaire. D’autres objecteront que représenter la Nation, c’est aussi visuellement la respecter, l’incarner.

Plus simplement, plus juridiquement aussi, comparons l’ancienne et la nouvelle version de l’article 9 de l’Instruction générale du Bureau de l’Assemblée Nationale, au sortir de ce qui aura été un feuilleton parlementaire qui aura amusé les médias la semaine passée. 

L’ancien article 9 de l’Instruction générale du Bureau de l’Assemblée Nationale était, depuis 2018, ainsi rédigé :

« Dans l’hémicycle, l’expression est exclusivement orale :
– l’utilisation, notamment pendant les questions au Gouvernement, à l’appui d’un propos, de graphiques, de pancartes, de documents, d’objets ou instruments divers est interdite. Lorsque ceux-ci sont utilisés par un ou plusieurs députés appartenant à un même groupe pendant l’intervention de l’un de ses membres, le Président peut retirer immédiatement la parole à ce dernier.
– la tenue vestimentaire adoptée par les députés dans l’hémicycle doit rester neutre et s’apparenter à une tenue de ville. Elle ne saurait être le prétexte à la manifestation de l’expression d’une quelconque opinion : est ainsi notamment prohibé le port de tout signe religieux ostensible, d’un uniforme, de logos ou messages commerciaux ou de slogans de nature politique.

« Il est interdit de téléphoner à l’intérieur de l’hémicycle.»

 

Voici la nouvelle formulation, la 71e modification dudit Règlement sous la Ve République, issue d’un arrêté du 9 novembre 2022. La mise en gras et en italique  des éléments fondamentalement nouveaux étant de nous, naturellement  :

« Tenue en séance  

« Dans l’hémicycle, l’expression est exclusivement orale.

« L’utilisation, notamment pendant les questions au Gouvernement, à l’appui d’un propos, de graphiques, de pancartes, de documents, d’objets ou instruments divers est interdite. Lorsque ceux‑ci sont utilisés par un ou plusieurs députés appartenant à un même groupe pendant l’intervention de l’un de ses membres, le Président peut retirer immédiatement la parole à ce dernier.

« La tenue vestimentaire adoptée par les députés dans l’hémicycle doit être neutre et en adéquation avec la solennité des lieux.À ce titre, elle doit rester convenable et non détendue ni, a fortiori, négligée. Est ainsi, par exemple, prohibé le port du short ou du bermuda. Pour les hommes, le port de la veste est obligatoire, celui de la cravate recommandé.

« La tenue vestimentaire ne saurait être, par ailleurs, le prétexte à la manifestation de l’expression d’une quelconque opinion : est ainsi notamment prohibé le port de tout signe religieux ostensible, d’un uniforme, de logos ou messages commerciaux ou de slogans de nature politique.

« Dans le périmètre sacré, lorsque l’Assemblée tient séance, les titulaires des badges mentionnés aux V et VI de l’article 26 de la présente Instruction générale du Bureau sont assujettis aux mêmes obligations.

« Il est interdit de téléphoner à l’intérieur de l’hémicycle.»

 

Sont donc maintenues avec des évolutions textuelles limitées :

  • les dispositions sur l’expression orale
  • l’interdiction de « l’utilisation, notamment pendant les questions au Gouvernement, à l’appui d’un propos, de graphiques, de pancartes, de documents, d’objets ou instruments divers »
  • l’interdiction de téléphoner
  • les dispositions sur la neutralité des tenues vestimentaires qui va jusqu’à la prohibition du port de tout signe religieux ostensible, d’un uniforme, de logos ou messages commerciaux ou de slogans de nature politique.

 

Sont ajoutés :

  • la formulation sur la tenue « convenable et non détendue ni, a fortiori, négligée. Est ainsi, par exemple, prohibé le port du short ou du bermuda »… formulations qui remplace la très datée référence à la « tenue de ville » mais qui ne change pas grand chose donc. Reste le porte de la veste (la demande de M. Ciotti d’imposer la cravate n’ayant pas fait consensus, et le port de celle-ci n’est donc que « recommandé », formulation à faible valeur juridique impérative donc).
  • l’extension de ces obligations aux « titulaires des badges mentionnés aux V et VI de l’article 26 de la présente Instruction générale du Bureau sont assujettis aux mêmes obligations.»
    Les médias ont résumé cela comme étant une extension aux collaborateurs des députés. En général, ce sont eux qui ont en effet de tels badges. Mais le mot « badge » (!) ne se retrouve pas dans lesdits V et VI de l’article 26, lequel couvre une plus grande diversité de personnes :

    • « V. – Une heure avant l’ouverture de la séance et pendant toute la durée de celle‑ci, l’accès au premier secteur est réservé :– aux sénateurs ;
      – aux membres du cabinet des ministres ou secrétaires d’État, titulaires d’une carte spéciale ;
      – aux membres du personnel qui y sont appelés par leur service ;
      – aux collaborateurs de groupe ;
      – aux collaborateurs de députés titulaires d’une carte professionnelle d’identité, pour les besoins de leur travail.
      Les commissaires du Gouvernement ont également accès à ce secteur dans les conditions fixées par le paragraphe VII.
    • « VI. – A. – Sont admis simultanément dans les couloirs d’accès à l’hémicycle et dans les tribunes situées au‑dessus de chaque entrée de l’hémicycle :
      – deux membres du cabinet du Président de la République ;
      – les membres du cabinet du Président spécialement autorisés ;
      – trois membres du cabinet du Premier ministre, trois membres du cabinet du ministre chargé des relations avec le Parlement, un membre du cabinet des autres ministres ou secrétaires d’État, titulaires d’une carte spéciale ;
      – trois membres du Secrétariat général du Gouvernement ;
      – les membres du personnel des assemblées prévues par la Constitution qui y sont appelés par leur service ;
      – les collaborateurs de groupe, titulaires d’une carte spéciale ;
      – un collaborateur du vice‑président qui préside la séance ;
      – un collaborateur de chacun des présidents de commission permanente et du Rapporteur général de la commission des finances lorsque la personnalité qu’ils assistent est présente au banc des commissions.
      Les groupes peuvent également bénéficier d’autorisations temporaires pour un débat déterminé.
      En outre, le Président peut autoriser l’accès à la salle des séances :
      – soit d’une manière permanente dans la limite de dix autorisations ;
      – soit provisoirement ou pour un débat déterminé.
      « B. – Au cours des séances consacrées aux questions au Gouvernement, aux déclarations de politique générale, aux débats au terme desquels la responsabilité du Gouvernement est engagée ou à la lecture d’un message du Président de la République, sont seuls admis à se tenir dans les couloirs d’accès à l’hémicycle :
      – un membre du cabinet du Premier ministre ;
      – un membre du cabinet du ministre chargé des relations avec le Parlement ;
      – un membre du cabinet du Président ;
      – un collaborateur par groupe.
      Les autres personnes autorisées en application du A ci‑dessus doivent obligatoirement prendre place dans les tribunes situées au‑dessus de chaque entrée de l’hémicycle ou dans les salons attenants à la salle des séances s’il n’y a plus de place dans les tribunes. »

 

Crédits photographiques : David Mark (sur Pixabay) ; cadrage modifié.