Reconstruction des bâtiments détruits lors des émeutes de l’été 2023 : le droit de l’urbanisme prend de la vitesse !

A la fin du mois de juillet 2023, était publiée une loi (n° 2023-656 du 25 juillet 2023) habilitant le gouvernement à modifier par voie d’ordonnance le Code de l’urbanisme afin de faciliter les opérations de reconstruction des bâtiments détruits lors des émeutes qui ont frappé près de 500 communes entre le 27 juin et le 5 juillet (v. sur cette loi : https://blog.landot-avocats.net/2023/07/26/reconstruction-des-batiments-suite-aux-emeutes-le-droit-de-lurbanisme-sadapte/).

Ces modifications viennent d’être effectuées par une ordonnance publiée ce jour, laquelle s’applique aux opérations de reconstruction ou de réfection à l’identique des bâtiments endommagés lors des émeutes de cet été, sous réserve que les demandes d’autorisation soient déposées dans un délai de 18 mois à compter du 13 septembre 2023.

En résumé, voici les règles spécifiques posées par cette ordonnance :

  1. Proclamation d’un droit à la reconstruction des bâtiments démolis ou dégradés.

Même si un document d’urbanisme local ne le permet pas, le propriétaire d’un bâtiment détruit dispose désormais du droit de le reconstruire (ou d’assurer sa réfection) à l’identique, sous réserve que la construction initiale ait été édifiée régulièrement et que soit assurée la sécurité des personnes.

Cette reconstruction pourra comporter des modifications par rapport à la construction initiale, dans une limite de 5% du gabarit, mais sans que la destination ou la sous-destination du bâtiment ne puisse être changée. Toutefois, ce seuil de 5 % pourra être dépassé si les modifications apportées au bâtiment dans le cadre de sa reconstruction visent à atteindre des objectifs en matière de performance énergétique, d’accessibilité ou de sécurité.

Et si l’autorisation délivrée prévoit des modifications du bâtiment initial, elle devra être motivée sur ce point.

2. Certains travaux pourront démarrer dès le dépôt de la demande d’autorisation, laquelle devra faire l’objet de mesures de publicité adaptées.

Innovation juridique majeure, l’ordonnance prévoit que les travaux et opérations de démolition et de terrassement ainsi que la réalisation des fondations pourront débuter dès que la demande de permis ou la déclaration préalable sera déposée.

A ce stade, le Maire est chargé par l’ordonnance de donner une publicité à la demande d’autorisation, soit par un affichage en mairie, soit sur le site Internet de la commune. De son côté, le demandeur de l’autorisation devra également afficher le récépissé de sa demande sur le terrain (sans que cette obligation ne soit assortie de la moindre sanction si elle est méconnue…).

3. Réduction des délais d’examen de la demande d’autorisation.

Par rapport aux délais de droit commun figurant dans le code de l’urbanisme, les délais d’examen des demandes d’autorisation relevant de l’ordonnance sont réduits de façon importante.

Ainsi, en cas de dossier incomplet, la demande des pièces manquantes devra être présentée dans les cinq jours qui suivent le dépôt de la demande d’autorisation.

Dans le même délai, la collectivité devra solliciter les avis et autorisations des organismes extérieures dont la consultation est parfois obligatoire. Dans ce cas, ces organismes devront alors se prononcer dans les quinze jours suivant la réception du dossier. A défaut, l’ordonnance prévoit que leur silence dans ce délai devra être considéré comme valant émission d’un avis favorable ou d’une  acceptation tacite du projet de reconstruction.

Et si la consultation de ces organismes a pour effet de majorer le délai d’instruction de la demande d’autorisation, cette majoration ne pourra excéder quinze jours à compter de la réception du dossier par l’organisme consulté, ce délai étant porté à quarante-cinq jours si le projet requiert la mise en oeuvre d’une procédure de participation du public prévue par le Code de l’environnement.

S’agissant de l’instruction de la demande, celle-ci devra être effectuée rapidement puisque l’ordonnance prévoit que le délai d’instruction des demandes de permis (de construire, d’aménager et de démolir) est d’un mois, tant que celui des déclarations préalables est ramené à quinze jours. 

4. La participation du public par voie électronique déloge la procédure d’enquête publique.

Si le projet doit faire l’objet d’une procédure de participation du public, l’ordonnance prévoit que la collectivité pourra recourir en toute hypothèse à la procédure de participation du public par voie électronique prévue par l’article L.123-19 du code de l’urbanisme. Cette procédure pourra ainsi remplacer l’organisation d’une enquête publique qui aurait dû normalement être mise en oeuvre.

Ref. : Ordonnance n° 2023-870 du 13 septembre 2023 tendant à l’accélération de la délivrance et la mise en œuvre des autorisations d’urbanisme permettant la reconstruction et la réfection des bâtiments dégradés au cours des violences urbaines survenues du 27 juin au 5 juillet 2023. Pour lire l’ordonnance, cliquer ici

Voir aussi :