Déconfinement scolaire : un point technique et juridique au 30 avril matin (avec versions beta des protocoles)

En attendant la diffusion, demain 1er mai, de la fiche définitive sur le déconfinement scolaire, voici :

  1. le projet non finalisé du protocole officiel ministériel, dont nous avons eu une « version beta » qui semble être celle d’hier 29 avril au matin, avant diffusion demain 1er mai (sans doute l’après-midi) d’une version définitive
  2. un lien vers les préconisations de l’AMF
  3. un lien vers les préconisations de France urbaine
  4. les conseils (liste bien faite) du HCSP
  5. les fruits des travaux d’un groupe de travail sénatorial
  6. les travaux sur ce point du Conseil scientifique COVID-19
  7. la position de l’Académie nationale de médecine
  8. la question de la généralisation des prises de température
  9. Notre analyse de ce que seraient les risques pour un maire refusant d’ouvrir l’école ou refusant d’assurer la pause méridienne / restauration scolaire  ou tenant de bloquer l’ouverture faute de fourniture de savon ou autre
  10. notre analyse sur le point de savoir si ce sujet relève du maire ou de l’intercommunalité selon les cas (point qui étrangement reste débattu)
  11. un topo sur les risques juridiques en ces domaines

 

 

NB : voir aussi (sur le port du masque) : https://lesprosdelapetiteenfance.fr/formation-droits/les-politiques-petite-enfance/tribunes-libres/deconfinement-et-accueil-du-jeune-enfant-limpact-du-port-du-masque-par-anne-dethier-et-florence

 

 

I. Voici le projet non finalisé de ce protocole (en version qui semble être celle d’hier 29 avril au matin)

 

 

Ce document de 63 pages (avec une bonne couverture de tous les problèmes à traiter, selon nous, mais avec un degré de précision encore assez faible à notre sens) :

 

A VOIR EN CLIQUANT CI-DESSOUS POUR SE PRÉPARER… :

PROTOCOLE SANITAIRE POUR LA REOUVERTURE DES ECOLES MATERNELLES ET ELEMENTAIRES

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EN VOICI LA TABLE DES MATIÈRES :

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II. Les préconisations de l’AMF

 

L’AMF a accompli un gros travail domaine par domaine. Voir notamment :

 

Dont voici des extraits :

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III. Le document de France urbaine

 

Voir :

Cliquer pour accéder à contribution_de_france_urbaine_a_la_preparation_du_deconfinement_education.pdf

 

IV. les conseils (liste bien faite) du HCSP

 

Nous avons diffusé (cliquer ici) l’avis du Haut conseil de la Santé publique sur les mesures barrières et de distanciation physique en population générale (liste claire point par point des mesures à respecter) 

Voici la liste des préconisations pour du HCSP pour la partie scolaire :

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V. Groupe de travail sénatorial

 

Un groupe de travail “Enseignement scolaire”, mis en place le 14 avril par le bureau de la commission, culture, éducation et communication du Sénat, a rendu jeudi 23 avril son rapport sur la reprise scolaire annoncée pour le 11 mai par le Gouvernement.

« Ce groupe de travail a notamment auditionné des experts médicaux et scientifiques, des représentants des collectivités territoriales, des recteurs, des représentants de chefs d’établissement, d’enseignants des premier et second degrés, des représentants des parents d’élèves ou encore des directeurs d’école ayant participé à l’accueil des enfants des personnels indispensables à la gestion de la crise. »

 

Extraits de la partie constat de ce rapport très critique :

I) La décision de rouvrir les établissements scolaires et les écoles à partir du 11 mai : une annonce surprise, aux modalités de mise en œuvre mal définies, élaborées sans concertation

a) Une impression d’impréparation et d’improvisation plus de 10 jours après l’annonce de cette réouverture

De très nombreuses personnes auditionnées ont fait part de leur surprise à l’annonce d’une réouverture des écoles à partir du 11 mai, qu’il s’agisse de personnes issues du monde médical ou de l’enseignement.

dant le 13 avril : selon les informations transmises au groupe de travail, les hypothèses de reprise portaient plutôt sur juin voire septembre.

b) des scénarios de travail ne reposant pas sur un avis scientifique

Alors que depuis le début du confinement, le gouvernement indique fonder ses décisions sur des avis scientifiques, les hypothèses de travail présentées mardi dépendent de préconisations sanitaires en cours de définition et non connues à ce jour.

c) Une absence de réelle concertation notamment avec les collectivités locales, partenaires essentiels du scolaire et du périscolaire

Le groupe de travail a été très surpris d’apprendre que ni l’Association des Maires de France, ni l’Assemblée des Départements de France ne semblaient avoir officiellement été contactées et associées à cette démarche de concertation.

d) De nombreuses questions demeurent auxquelles ne répondent pas les dernières déclarations du ministre de l’éducation nationale

À moins de trois semaines de la date prévue de la réouverture des classes, de très nombreuses questions pratiques demeurent [et qui n’ont pas été traitées, ndlr]. En voici quelques-unes:

 

      • Quel doit être l’objectif de ces cinq à huit semaines de cours restantes ?
        Un consensus se dégage de l’ensemble des auditions. Il n’est pas possible au 11 mai de reprendre les cours comme si le confinement n’avait pas existé.
      • Le respect des gestes barrières et la question des points d’eau.
        La question des sanitaires et de l’accès à des points d’eau est également souvent revenue. Selon un sondage réalisé mi-mars par l’observatoire national de la sécurité et de l’accessibilité des établissements d’enseignement, 25 % des écoles n’ont pas de points d’eau en nombre suffisant. 75 % et 77 % des collèges et lycées estimaient également à cette période ne pas disposer de gel hydroalcoolique en quantité suffisante.
      • L’annonce de groupes de 15 élèves maximum par classe : une hypothèse de travail considérée comme trop élevée et faisant fi des différences de situation entre les établissements.
        Ce plafond unique de 15 élèves par classe méconnait la diversité des établissements français.
      • Une absence de recensement des moyens humains et matériels disponibles.
        À ce jour, il n’a été procédé à aucun recensement du nombre d’enseignants qui ne pourront pas reprendre les cours en présentiel parce qu’ils font partie des personnes vulnérables ou ont dans leur foyer une personne vulnérable.
      • La gestion des temps entourant les moments pédagogiques : grande absente des réflexions nationales actuelles.
        Le groupe de travail a constaté qu’aucune réflexion n’avait commencé sur les temps entourant les moments pédagogiques.
      • La gestion des abords de l’école et des flux d’élèves à l’intérieur des établissements : éviter la création d’attroupements.
        Cette thématique va conduire à des solutions personnalisées pour chaque établissement d’enseignement, nécessitant un temps de préparation.
      • La restauration, les internats et les transports scolaires : une réflexion indispensable pour un retour des élèves en classe.
        Le groupe de travail constate qu’à chaque fois que ces thématiques ont été évoquées, aucune réponse n’a été apportée.
      • La question de l’accueil des petites et moyennes sections de maternelle.Comme la quasi-unanimité des personnes auditionnées, le groupe de travail est sceptique sur la possibilité de faire revenir en présentiel les enfants des petites et moyennes sections de maternelle.

Le groupe de travail poursuit son rapport par onze préconisations pour « un retour progressif, concerté et sécurisé »qui aboutissent toutes au même constat : pas de reprise sérieuse et sécurisée des cours envisageable avant la rentrée de septembre 2020.

 

VOICI LES PRÉREQUIS ET PRÉCONISATIONS DE CE GROUPE DE TRAVAIL

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SOURCES :

 

http://www.senat.fr/presse/cp20200423.html

http://www.senat.fr/fileadmin/Fichiers/Images/communication/Culture/GT_enseignement_scolaire_retour_des_eleves_en_classe_synthese-1.pdf

 

VI. Position du Conseil scientifique COVID-19

 

https://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/note_enfants_ecoles_environnements_familiaux_24_avri_2020.pdf

 

 

VII. La position de l’Académie nationale de médecine

 

Voir :

 

VIII. La question de la généralisation des prises de température

 

Voir à ce sujet :

 

IX. Notre analyse de ce que seraient les risques pour un maire refusant d’ouvrir l’école ou refusant d’assurer la pause méridienne / restauration scolaire  ou tenant de bloquer l’ouverture faute de fourniture de savon ou autre

 

De nombreux maires ont annoncé vouloir soit fermer l’école, soit refuser la restauration collective. Voir par exemple :

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Il faut sérier les choses :

  • soit il s’agit de ne pas assurer la restauration collective ou plus largement la gestion de la pause méridienne… et là s »agissant de services publics facultatifs, rien ne nous semble imposer quoi que ce soit à la commune (et le protocole sanitaire final devrait être souple là dessus ; voir ci-avant en « I »)
  • soit il s’agit de fermer l’école au titre de la compétence scolaire de la commune… et là se pose la question de savoir si cela relève des compétences de la commune. Dans le code de l’éducation, certes le maire peut-il décider de la fermeture des locaux mais ce n’est qu’à deux conditions cumulatives :
    • 1/ si l’accès aux locaux ne peut plus être assuré dans les conditions d’hygiène et de sécurité satisfaisantes (bon ça se défend mais pas si les conditions viennent de l’attitude de la commune elle-même !)
    • 2/ et de toute manière, cela impose l’accord de l’inspecteur d’académie… Bref fausse piste en droit pour le maire qui voudrait s’imposer à l’IA et au DASEN
  • soit le maire contourne l’obstacle en refusant la fourniture de savon ou autre…. et alors à ce stade au moins les projets de protocoles sanitaires prévoient la non ouverture de l’école mais la commune pourrait engager sa responsabilité. Responsabilité pénale, sans doute pas (pour schématiser une question complexe)… mais responsabilité administrative pour les familles et les entreprises ne pouvant rouvrir ou fonctionner, peut-être avec donc un risque financier non négligeable à la clef si du moins un recours est engagé.
  • soit le maire joue la carte de ses pouvoirs de police. Or, ematière de pouvoir de police, le Conseil d’Etat a posé que dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire, les maires ne peuvent prendre des mesures supplémentaires de lutte contre le covid-19 que si des circonstances propres à leur commune l’imposent. Exit donc les ajustements locaux pour tenter de faire différemment, au moins un peu.
    Source : CE, ord., 17 avril 2020, n° 440057 (et voir en première instance : TA Cergy-Pontoise, ord., 9 avril 2020, LDH, n°2003905). Voir : Covid-19 : 40 jours de jurisprudence mettent les pouvoirs de police des maires…. en quasi-quarantaine 
    DONC ce n’est que dans des cas très très limités, fondés sur des circonstances locales réellement différentes de la moyenne nationale ou de la moyenne des zones rouges concernées, que le maire pourra agir différemment au titre de ses pouvoirs de police (et sans doute en va-t-il de même s’il agit au titre de ses pouvoirs tirés de la compétence scolaire communale).

CELA DIT :

  • le risque de destitution du maire est limité à des cas très extrêmes (voir par exemple ici)
  • l’illégalité de la décision du maire devant le juge administratif est une censure dont on peut mesurer les limites pratiques
  • le risque de recours indemnitaire risque d’être limité et le maire ne serait pas sans forte ligne de défense dans certains cas (mais les sommes demandées pourraient être fortes… à bien méditer donc)
  • le risque pénal (voir ci-après point XI) pour le maire d’une décision d’ouverture, en revanche, n’est pas non plus en sens inverse à minorer.

 

Inversement, ne surtout pas faire comme ce maire signalé ici sur Twitter… Voir :

 

X. notre analyse sur le point de savoir si ce sujet relève du maire ou de l’intercommunalité selon les cas (point qui étrangement reste débattu)

 

Le principe est que quand une compétence est intercommunalisée, c’est à l’EPCI (à fiscalité propre ou non selon les cas) qu’il revient d’agir.

Sources : l’arrêt de référence en cette matière, confirmé sans interruption depuis, est CE, Ass., 16 octobre 1970, Cne de Saint-Vallier, Rec. p. 583.

Il en va de même en matière scolaire bien naturellement. Les deux seuls bémols en la matière portent sur :

  • l’inscription scolaire car la compétence est alors faite par le maire au nom de l’Etat (CE, 28 mai 1986, Epoux André c/ Maire de Chatillon le Duc, req. n° 39775 et 47115 ; CAA Bordeaux, 5 juillet 1999, Commune de Pontonx sur l’Adour, req. n° 96BX01428 ; mais voir en sens inverse CAA Lyon, 12 juillet 2018, n° 16LY03037… dossier où visiblement les avocats en cause avaient juste oublié de soulever le moyen cela dit…voir ici)
  • la restauration scolaire, et sans doute n’est-ce que pour les collèges et les lycées (pour un cas choquant voir ici)

POURTANT au moins un DASEN a affirmé l’inverse à des maires assemblés en visioconférence. Disons par charité que nous poserons que les DASEN ont trop à faire ces temps-ci pour vérifier en droit toutes leurs affirmations.

 

XI. Cadre et risques juridiques en ces domaines

 

Tout d’abord, rappelons qu’entre la commune et la direction de l’école et/ou le conseil d’école, la répartition des tâches peut être ainsi schématisée :

Compétence municipale ? Pouvoir du conseil d’Ecole ? (avec suspension partielle de son activité en phase d’état d’urgence sanitaire)
Matériel et équipement des locaux Oui Avis dans certains cas
Temps scolaire * Non Oui
Autres usages des locaux pour les besoins de la formation Non Oui
Activités péri-scolaires pendant les heures d’ouverture Oui Accord requis
Reste du temps Compétence du maire Avis simple
Service minimum d’accueil Oui Sans doute même pas d’avis à demander

* dont, selon le Ministère, les enseignements de langue et culture d’origine (dont le remplacement par un autre régime est annoncé pour la rentrée prochaine ; voir ici), les réunions pédagogiques, les temps gérés par la commune mais insérés dans le temps scolaire dans le cas des réformes des rythmes scolaires… ce qui est débattu en droit

Deux grandes bases juridiques sont ensuite à avoir à l’esprit.

La première, c’est le corps de règles propres à l’état d’urgence sanitaire. Ces règles changent très souvent depuis la mi-mars et il n’est pas certain que le mouvement se ralentisse. Il faut donc suivre régulièrement les évolutions.  

La seconde grande base juridique est, elle, inchangée depuis presque 20 ans : c’est la loi Fauchon du 10 juillet 2000, laquelle impose une distinction majeure en matière d’infractions commises, non pas volontairement, mais par négligence ou par imprudence :

  • soit le comportement du prévenu a causé directement le dommage : la simple imprudence, négligence, maladresse, suffisent alors à constituer le délit
  • soit la personne poursuivie n’a « que » créé ou contribué à créer la situation qui a permis la réalisation du dommage ou n’a pas pris les mesures permettant de l’éviter. Dans ce cas, elle ne sera condamnée que :

–   soit si elle a violé de façon manifestement délibérée une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement,

–   soit si elle a commis une faute caractérisée qui exposait autrui à un risque d’une particulière gravité et qu’elle ne pouvait ignorer.

Concrètement, il en résulte que les élus et les cadres territoriaux ont tout intérêt, pour leur sécurité pénale, à faire montre d’une vigilance maximale :

  • soit s’ils se voient assigner, par la loi ou le règlement des normes graves et particulières de sécurité ;
  • soit si leur inaction, ou leurs actions mal à propos, peuvent conduire directement à la commission d’un délit tel que celui de blessures par imprudence.

En ce domaine il importe donc de sérier la dangerosité, les coûts, les mesures en ayant à l’esprit :

  • en cas de risque d’être soi même la cause directe d’un préjudice incontestable et identifiable : ne pas prendre de risque, mettre très haut la barre de la sécurité à atteindre. Pour la commune, le risque de causalité directe au titre du Covid-19 est faible (ce n’est pas le maire qui inocule directement le virus…) et les questions de preuve se poseraient 
  • en cas de norme (non pas indicative, mais impérative…. La plupart des normes en matière de masques hors usage médical, par exemple, sont des normes indicatives et non impératives) : idem, mettre très haut la barre de la sécurité à atteindre.  A ce jour, les protocoles seront des normes indicatives et non impératives en droit. Mais ce point peut changer au fil des textes à venir. 
  • dans les autres cas, les plus nombreux, non qu’il faille agir avec légèreté, loin s’en faut, mais dans ces autres cas le décideur local ne verra sa responsabilité engagée qu’en cas de faute caractérisée. Donc le maire peut combiner les normes indicatives, faire sa propre combinaison de règles ou de mesures à prendre, sous réserve de pouvoir démontrer qu’il a tenté d’être prudent. Les arbitrages redeviennent possibles s’ils sont marqués par le sceau de la prudence. Surtout, il faut garder trace de toutes ses mesures de prudence, des raisons pour lesquelles tel ou tel arbitrage fut fait… 

 

XII. Image d’une cantine (restauration scolaire) d’un collège en Chine

 

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