Une (petite) rafale de textes se trouve au JO de ce matin pour traiter de la nouvelle autorisation environnementale :
- Ordonnance no 2017-80 du 26 janvier 2017 relative à l’autorisation environnementale
- Décret no 2017-81 du 26 janvier 2017 relatif à l’autorisation environnementale
- Décret no 2017-82 du 26 janvier 2017 relatif à l’autorisation environnementale
- auquel il faut ajouter le « Rapport au Président de la République relatif à l’ordonnance n° 2017-80 du 26 janvier 2017 relative à l’autorisation environnementale »
En tout, c’est un nouveau titre, en partie législative comme réglementaire, qui est ajouté au livre Ier du Code de l’environnement : un nouveau titre VIII intitulé « Procédures administratives » et comportant un chapitre unique intitulé « Autorisation environnementale », composé des articles L. 181-1 à L. 181-31 et R. 181-1 à R. 181-56.
Ce code, autrefois léger, ne cesse, décidément, de prendre du poids.
Cette réforme résulte :
- des expérimentations qui furent faites depuis mars 2014 dans certaines régions concernant les installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE) et les installations, ouvrages, travaux et activités (IOTA) soumis à la législation sur l’eau, et ce en application de la loi du 2 janvier 2014.
- de la loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte, laquelle a étendu depuis le 1er novembre 2015 ces expérimentations à la France entière pour les ICPE relatives aux énergies renouvelables et pour les IOTA.
- de l’article 103 de la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques .
L’ordonnance entre en vigueur le 1er mars 2017. A compter de cette date, les porteurs de projet pourront déposer des demandes d’autorisation environnementales. Toutefois :
- les projets pour lesquels une demande d’autorisation a été déposée avant le 1er mars 2017, continuent à être instruits suivant les anciennes procédures ;
- le porteur de projet peut choisir, jusqu’au 30 juin 2017, entre déposer des demandes conformes aux anciennes législations ou une demande d’autorisation environnementale ; il en est de même au-delà de cette date si un certificat de projet a été délivré avant le 1er mars, et pour les projets pour lesquels une enquête publique préalable à déclaration d’utilité publique a été ouverte avant le 1er mars 2017.
Le présent résumé repose sur notre lecture, mais aussi sur le rapport au Président de la République qui est pour partie repris dans le texte ci-dessous.
Qu’est-ce que l’autorisation environnementale ?
L’autorisation environnementale est applicable principalement aux ICPE et autres IOTA.
Le nouvel article L. 181-1 du Code de l’environnement précise le champ d’application de l’autorisation environnementale : sont ainsi soumis à la nouvelle procédure les installations, ouvrages, travaux et activités (IOTA) soumis à la législation sur l’eau et les installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE), lorsqu’ils relèvent du régime d’autorisation.
Sont également concernés les projets soumis à évaluation environnementale et qui ne sont pas soumis à une autorisation administrative susceptible de porter les mesures d’évitement, de réduction ou de compensation.
Les procédures d’autorisation ICPE et IOTA disparaissent donc en tant que telles. Les procédures de déclaration et d’enregistrement restent inchangées.
Citons cet article L. 181-1 C. env., nouveau :
« applicable aux activités, installations, ouvrages et travaux suivants, lorsqu’ils ne présentent pas un caractère temporaire :
« 1° Installations, ouvrages, travaux et activités mentionnés au I de l’article L. 214-3, y compris les prélèvements d’eau pour l’irrigation en faveur d’un organisme unique en application du 6° du II de l’article L. 211-3 ;
« 2° Installations classées pour la protection de l’environnement mentionnées à l’article L. 512-1.« Elle est également applicable aux projets mentionnés au deuxième alinéa du II de l’article L. 122-1-1 lorsque l’autorité administrative compétente pour délivrer l’autorisation est le préfet, ainsi qu’aux projets mentionnés au troisième alinéa de ce II.
« L’autorisation environnementale inclut les équipements, installations et activités figurant dans le projet du pétitionnaire que leur connexité rend nécessaires à ces activités, installations, ouvrages et travaux ou dont la proximité est de nature à en modifier notablement les dangers ou inconvénients.
L’article L. 181-2 précise que l’autorisation environnementale vaut, pour les projets qui y sont soumis :
- – autorisation spéciale au titre des réserves naturelles nationales et des réserves naturelles classées en Corse par l’Etat ;
- – autorisation spéciale au titre des sites classés ou en instance de classement ;
- – dérogation aux mesures de protection de la faune et de la flore sauvage ;
- – absence d’opposition au titre des sites Natura 2000 ;
- – déclaration ou agrément pour l’utilisation d’organismes génétiquement modifiés ;
- – agrément pour le traitement de déchets ;
- – autorisation d’exploiter une installation de production d’électricité ;
- – autorisation d’émission de gaz à effet de serre ;
- – autorisation de défrichement ;
- – pour les éoliennes terrestres, autorisations au titre des obstacles à la navigation aérienne, des servitudes militaires et des abords des monuments historiques et sites patrimoniaux remarquables ;
- – déclaration IOTA, enregistrement ou déclaration ICPE.
Cet article prévoit toutefois, pour les projets relevant du ministre de la défense, de l’Autorité de sûreté nucléaire ou du délégué à la sûreté nucléaire et à la radioprotection pour les activités et installations intéressant la défense, que l’autorisation environnementale n’intègre que les autorisations IOTA et ICPE.
Autorisation environnementale et autorisations d’urbanisme
ATTENTION : l’autorisation environnementale ne vaut pas autorisation d’urbanisme, celle-ci relevant d’une approche très différente dans ses objectifs, son contenu, ses délais et l’autorité administrative compétente.
Toutefois, les articles L. 181-9 et L. 181-30 précisent l’articulation entre l’autorisation environnementale et l’autorisation d’urbanisme éventuelle : cette dernière peut être délivrée avant l’autorisation environnementale, mais elle ne peut être exécutée qu’après la délivrance de l’autorisation environnementale.
En outre, la demande d’autorisation environnementale pourra être rejetée si elle apparaît manifestement insusceptible d’être délivrée eu égard à l’affectation prévue des sols prévue par le document d’urbanisme.
Par ailleurs, pour les éoliennes seulement, l’autorisation environnementale dispense de permis de construire.
Conditions nécessaires à la délivrance de l’autorisation
L’article L. 181-3 précise les conditions nécessaires à la délivrance de l’autorisation environnementale. Certaines de ces conditions consistent à assurer la protection d’un certain nombre d’intérêts tels que la santé, la sécurité, la salubrité publiques, l’environnement, la ressource en eau, les paysages, l’agriculture.
L’article L. 181-4 précise que les projets soumis à autorisation environnementale restent soumis aux dispositions de fond prévues par les législations attachées aux décisions dont l’autorisation environnementale tient lieu.
Procédure
Mais c’est surtout les sections 2 et suivantes de ce nouveau titre du Livre 1er du Code de l’environnement qui traite de la demande d’autorisation et des étapes précédant son dépôt, notamment la possibilité d’établissement d’un certificat de projet.
Sur ce point, il faut se rapporter aux articles L. 181-5 et suivants, nouveaux, du code, mais aussi aux articles R. 181-1 à R. 181-49 du code tels qu’issus du nouveau décret no 2017-81 du 26 janvier 2017 relatif à l’autorisation environnementale. Mais sur les pièces à apporter, le contenu du dossier, certaines modalités d’instruction, il faut prendre en compte le Décret no 2017-82 du 26 janvier 2017 (pour l’essentiel les articles D. 181-15-1 et suivants, nouveaux, de ce code).
Avant le dépôt d’une demande d’autorisation environnementale, l’article L. 181-5 prévoit que le pétitionnaire puisse demander au préfet des informations ou des avis visés par d’autres textes, ou, en vertu de l’article L. 181-6, la délivrance d’un certificat de projet.
Le certificat de projet identifie les régimes et procédures dont relève le projet, précise le contenu attendu du dossier, et peut fixer en accord avec le porteur de projet un calendrier d’instruction à titre d’engagement réciproque. Il intègre l’archéologie préventive et peut intégrer d’autres procédures amont, l’examen cas par cas le cadrage préalable en matière d’évaluation environnementale, et le certificat d’urbanisme.
Ces éléments offrent au porteur de projet une bonne visibilité sur les règles et conditions d’instruction applicables à son projet.
L’article L. 181-7 prévoit ensuite que certains projets complexes ou de grande ampleur peuvent faire l’objet d’autorisations environnementales par tranches, pour peu que le périmètre des tranches soit en cohérence avec des critères fonctionnels et environnementaux.
L’article L. 181-8 précise le contenu du dossier de demande d’autorisation. Concernant les projets pour lesquels une étude d’impact n’est pas à produire, le dossier de demande doit comporter une étude d’incidence environnementale. Un décret simple précisera les pièces spécifiques à produire, en fonction des autorisations intégrées. Enfin, le pétitionnaire pourra identifier, au sein de son dossier, les informations relevant des secrets protégés par la loi.
La section 3 concerne l’instruction de la demande d’autorisation environnementale.
Cette instruction est composée d’une phase d’examen, d’une phase d’enquête publique et d’une phase de décision comme le précise l’article L. 181-9.
L’article L. 181-11 dispose que les règles de procédure définies dans la partie réglementaire, telles que les consultations, se substituent à toutes celles attachées aux différentes législations intégrées dans l’autorisation environnementale.
La phase d’examen est encadrée par la sous-section 1 de la partie réglementaire, laquelle définit notamment les consultations à mener, en diminution par rapport au droit actuel. Sa durée est en règle générale fixée à quatre mois, sauf calendrier négocié avec le pétitionnaire. Il est prévu que le préfet puisse, dès cette étape, rejeter la demande d’autorisation environnementale lorsqu’il apparaît d’ores et déjà que le projet ne pourra être autorisé en l’état.
L’article L. 181-10 et la sous-section 2 de la partie réglementaire encadrent ensuite la phase d’enquête publique. Cette enquête est organisée par le préfet, et de manière mutualisée avec les éventuelles autres enquêtes publiques. L’article L. 181-10 prévoit, en parallèle, la consultation des collectivités territoriales concernées.
La phase de décision est encadrée par l’article L. 181-12 et par la sous-section 3 de la partie réglementaire. Sauf calendrier négocié avec le pétitionnaire, dans les deux mois suivant la fin de la phase d’enquête publique, ou trois mois si le préfet juge nécessaire de saisir la commission départementale compétente, le préfet prend l’arrêté d’autorisation ou de refus d’autorisation. L’arrêté d’autorisation est assorti des prescriptions nécessaires, notamment les mesures d’évitement, de réduction et de compensation des impacts.
Et après l’autorisation ?
La section 4 comporte des dispositions applicables après délivrance de l’autorisation environnementale.
L’article L. 181-13 permet au préfet de demander à tout moment une tierce expertise du dossier aux frais du pétitionnaire.
L’article L. 181-14 précise les procédures applicables en cas de modification du projet, suivant qu’il s’agit ou non de modifications substantielles. Il donne la possibilité au préfet d’imposer à tout moment, par arrêté complémentaire, de sa propre initiative ou sur demande du bénéficiaire, des prescriptions complémentaires.
L’article L. 181-15 traite des modifications particulières que sont les changements de bénéficiaires des autorisations environnementales, qui sont en règle générale soumis à déclaration, ainsi que les prolongations et renouvellements des autorisations qui ont été délivrées pour une durée limitée.
Contrôles et sanctions
Sur ce point, il faut se rapporter aux articles L. 181-16 et suivants, nouveaux, du code, mais aussi aux articles R. 181-50 et suivants du code tels qu’issus du nouveau décret no 2017-81 du 26 janvier 2017.
L’article L. 181-16 précise que les contrôles et sanctions sont réalisés dans les conditions et par les agents prévus par les législations afférentes aux différentes autorisations intégrées par l’autorisation environnementale.
L’article L. 181-17 dispose que le contentieux afférent à l’autorisation environnementale est un contentieux de pleine juridiction.
L’article L. 181-18 prévoit que le juge peut n’annuler qu’une partie de la procédure d’autorisation environnementale ou qu’une partie de l’autorisation, et peut surseoir à statuer jusqu’à régularisation.
La partie réglementaire fixe le délai de recours contentieux à deux mois pour le pétitionnaire, et à quatre mois pour les tiers, ce délai pouvant être prorogé de deux mois en cas de recours administratif.
La section 6 comporte des dispositions applicables à certaines catégories de projets.
Les articles L. 181-19 à L. 181-23 concernent les IOTA. Ils prévoient notamment que l’autorisation environnementale a en général une durée de validité, définissent les cas dans lesquels l’autorisation environnementale peut être abrogée sans indemnité, et précisent les conditions de remise en état en cas d’arrêt du projet.
Les articles L. 181-24 à L. 181-28 sont spécifiques aux ICPE. Ils prévoient que le dossier de demande d’autorisation environnementale comporte une étude de dangers, que la délivrance de l’autorisation peut être subordonnée à des distances d’éloignement et prend en compte les capacités techniques et financières que le pétitionnaire prévoit de mettre en œuvre, et précisent les cas où l’autorisation environnementale est délivrée pour une durée limitée (notamment les carrières).
N.B. : voir aussi la section 7 pour les dispositions diverses notamment les articulations entre codes.