En matière de recours contentieux relatifs à la TEOM, une décision du Conseil d’Etat nous enseigne (sans surprise certes) :
- que la personne publique qui a fixé le taux est bien fondée à s’inviter au contentieux via une intervention volontaire (et c’est fort heureux, même si cela était peu contesté)
- que l’on ne prend pas en compte les AC (en tous cas en AC normales, le point pourrait être discuté en cas d’AC négatives) dans le calcul de couverture des dépenses de la TEOM
A la suite de l’arrêt Auchan, fondateur, de 2014, les collectivités ont eu pendant 6 ou 7 ans à subir une avalanche de mauvaises nouvelles :
- les TEOM excédentaires sont devenues vite illégales, même pour des débords fort limités
- le juge a imposé des modes de calcul inquiétants
- le contribuable requérant peut même y gagner une gratuité fiscale
- la facture qui in fine reposait sur l’Etat incombe désormais aux collectivités
- le juge a admis la possibilité d’actions en reconnaissance de droits (une des variantes des class actions à la française), en ce domaine.
- et c’est toujours bien l’Etat qui assure la défense des collectivités, mais in fine un régime a été imposé par le législateur pour que l’Etat puisse ensuite faire passer à la caisse la personne morale qui a institué la TEOM censurée par le juge.
… Sur ce dernier point, autant dire que les intercommunalités (ou syndicats) ayant insinué le taux de TEOM avaient intérêt à appuyer la défense faite par l’Etat, via une « intervention volontaire » à l’appui de la défense.
Oui mais… il restait quelques doutes pour savoir si une telle intervention était de droit.
Bonne nouvelle : elle l’est ! Nous n’avions pas beaucoup de doute, à vrai dire (cf. par analogie les principes généraux de recevabilité des interventions, CE, Section, 25 juillet 2013, n° 350661, rec. p. 224), mais il est toujours rassurant que le Conseil d’Etat l’ait écrit de manière fort claire.
La Haute Assemblée pose en effet qu’il résulte de la nature et de l’objet du contentieux que la personne publique ayant fixé le taux de la taxe d’enlèvement des ordures ménagères (TEOM) justifie d’un intérêt de nature à la rendre recevable à intervenir devant le juge de l’impôt, saisi d’une demande de décharge de cette taxe, compte tenu de la particularité des litiges en matière de TEOM.
Son intervention doit, dès lors, être admise.
Autre précision du juge, peu surprenante : en fiscalité professionnelle unique (FPU), les attributions de compensation (AC) versées par un établissement de coopération intercommunale (EPCI) à ses communes membres en vertu du 1° du V de l’article 1609 nonies C du code général des impôts (CGI), lorsque les ressources de ces communes qui étaient liées aux charges qui ont été transférées à l’établissement étaient excédentaires l’année précédant le transfert, ne sont pas, eu égard à leur objet, au nombre des dépenses susceptibles d’être couvertes par la TEOM.
La somme reversée via l’AC ne servant pas à couvrir des dépenses liées au service des déchets ménagers, et étant le fruit d’un excédent des ressources fiscales transférées sur le montant des dépenses de transfert… cela semble à tout le moins fort logique. Sauf si comme souvent on a sous-estimé les dépenses de transfert, par optimisme financier ou sous-utilisation des conseils de votre avocat publiciste préféré…
Source de cette nouvelle décision :
Conseil d’État, 30 septembre 2022, n° 455364, à mentionner aux tables du recueil Lebon
VOIR AUSSI CETTE VIDÉO :
Voici une vidéo assez récente où je tente de parcourir en 10 mn 25 les contentieux TEOM depuis la jurisprudence AUCHAN :
Sources : CE, 31 mars 2014, Auchan, n°368111 ; TA Lyon, 9/1/2015, n°1402323 ; TA de Montreuil, 18 mai 2017, n°s 1434675 et 1439146, Groupe Auchan SA (voir cependant ensuite Conseil d’État, 11/07/2018, n° 412263) ; TA Lyon, 4 décembre 2017, n°1506949 et 1605089, n° 1507006 et 1507008, n°1507046, n°1507047, etc. ; CE 19/03/2018, n° 402946 ; CE, 25/06/2018, n° 414056 ; articles L. 2331-2 et L. 2331-4 du CGCT ; TA Montreuil, 8 octobre 2018, n°1643344 – 1643345 ; CE, 28 avril 2014, n°357090 ; Jugements rendus le 23 mai 2018 par le TA de Cergy-Pontoise ; conclusions de M. Toutée sur CE, 8 juin 1990, Assaupamar, n°93191, publié au rec. ; CE, 18 mai 2018, n° 411045 et 411583 ; CE, 24/10/2018, Casino, n°413895 ; III de l’article 1639 A du CGI ; TA Lyon, 14 novembre 2018, n° 1702610 ; LFI 2019 n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 ; art. L. 3662-2 et L. 5219-8-1 du CGCT ; CE, 20 septembre 2019, n° 419661 ; art. 1520 et 1521 du CGI ; CE, 13 février 1980, S.A. « Au Bon Marché », n° 10697, rec. T. p. 671 ; CE, 12 mars 2021, n° 442583, à publier aux tables du rec. ; CE, 1er juillet 2020, n° 424288 ; TA Lyon, n° 1803391-1803392, CANOL, 26 octobre 2020, C+ ; TA Lyon, n° 1904685, CANOL, 26 octobre 2020, C+ ; CE, 4 octobre 2021, n° 448651, à publier au recueil Lebon ; CE, 22 octobre 2021, N° 434900, à publier en intégral au recueil Lebon ; CE, 15 novembre 2021, n° 454125, à publier au recueil Lebon ; art. L. 2333-78 du CGCT ; CE, 29 novembre 2021, n° 454684.
Vous devez être connecté pour poster un commentaire.