Extinction nocturne des publicités lumineuses : le Conseil d’Etat valide le décret mais censure l’immédiateté de son application.
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Publicités lumineuses : la généralisation de l’extinction entre 1 et 6 h du matin (avec amendes à la clef), par le décret n° 2022-1294 du 5 octobre 2022, était bien illégale en ce qu’elle prévoyait dans certains cas une application immédiate.
Cette dernière était contraire en effet au principe de sécurité juridique, selon le Conseil d’Etat.
Ce décret est donc validé en lui-même par la Haute Assemblée, mais il était illégal en tant que ce décret n’avait pas différé d’un mois l’entrée en vigueur de cette obligation.
D’un point de vue pratique, une annulation uniquement en ce que le décret n’a pas prévu une période d’adaptation d’un mois pour les administrés, intervenant en février 2023 pour un décret d’octobre 2022, n’aura d’effet concret que pour ceux, rares, qui auront été sanctionnés d’une amende entre le 7 octobre 2022 (date d’entrée en vigueur du décret du 6 octobre 2022) et le 7, voire le 8 novembre 2022.
Source :
Voir aussi :
- les conclusions de M. Philippe RANQUET, Rapporteur public
- Le futur résumé des tables tel que préfiguré par celui de la base Ariane
Renvois sur ce décret, les publicités lumineuses et les pollutions lumineuses
Sur ce décret, voir :
Voir également :
- Publicités lumineuses : extinction obligatoire, y compris des publicités des vitrines, « en cas de forte tension sur le système électrique » (Ecowatt rouge)
- Pollution lumineuse : éteindre la nuit [VIDEO avec Weka]
Compléments sur le principe de sécurité juridique
Ainsi que le rappellent les articles L. 221-5 et L. 221-6 du code des relations entre le public et l’administration (CRPA), il incombe à l’autorité investie du pouvoir réglementaire d’édicter, pour des motifs de sécurité juridique, les mesures transitoires qu’implique, s’il y a lieu, une réglementation nouvelle. Il en va ainsi en particulier lorsque l’application immédiate de celle-ci entraîne, au regard de l’objet et des effets de ses dispositions, une atteinte excessive aux intérêts publics ou privés en cause.
Ces principes, posés par le CRPA, résultent d’une jurisprudence désormais constante et, même, exigeante (CE, Assemblée, 24 mars 2006, Société KPMG et autres, n° 288460, rec. p. 154 ; CE, Section, 13 décembre 2006, Mme , n° 287845, rec. p. 540).
Plus encore, le juge s’autorise lui-même à imposer, transitoirement, de telles transitions juridiques au delà de ce qui était prévu ou avec plus d’étapes que prévu (y compris si cela résulte de décisions de Justice et/ou de difficultés identifiées en cours de mise en oeuvre : CE, 30 décembre 2021, n°434004 et autres, à mentionner aux tables du recueil Lebon ;voir ici notre article).
Le principe de sécurité juridique d’ailleurs s’impose en d’autres domaines que celle des mesures transitoires nécessaires parfois pour passer d’un cadre juridique ancien à un cadre juridique nouveau.
C’est ainsi cette même sécurité juridique a conduit, avec le fameux arrêt Czabaj, à limiter dans le temps les recours contre les actes individuels entachés d’insuffisances en termes de notification des voies et délais de recours. Voir :
- L’absence de voies et délais de recours ne permet plus d’attaquer indéfiniment une décision administrative individuelle
- Voir aussi entre autres, pour démontrer l’ampleur prise par cette jurisprudence importante :
- Les tiers ne peuvent contester indéfiniment une décision administrative individuelle qui a fait l’objet d’une mesure de publicité à leur égard… même en cas de fraude (précision ce jugement de TA reste très incertain dans sa postérité selon nous)
- Actes individuels mal notifiés : application stricte ou non du délai d’un an ?
- Actes individuels mal notifiés : application stricte ou non du délai d’un an ?
- Marché public, titre de recettes et mention des voies et délais de recours
- Peut-on motiver, par avance, une décision implicite de rejet ?
- Sécurité juridique : quand, en matière éducative notamment, est-il trop tard pour changer les règles du jeu ?
- etc.