Les dépenses relatives aux déchets sur voirie (notamment des poubelles de rue) sont bien à prendre en compte dans le calcul de la TEOM !

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Retraçons l’évolution des règles de calcul de la taux de taxe d’enlèvement des ordures ménagères (TEOM), et des conséquences contentieuses en ce domaine, qui ont beaucoup changé depuis quelques années (I)… avant que d’aborder l’importante nouveauté du jour (car les sommes concernées sont loin d’être négligeables : les dépenses relatives aux déchets sur voirie (notamment des poubelles de rue… mais on pourrait débattre de l’ampleur dès lors des dépenses correspondantes à prendre en considération) sont bien à prendre en compte dans le calcul de la TEOM (II).

 

 

I. D’une manière générale, un régime strict, mais qui devient moins déraisonnable

 

A la suite du célèbre arrêt Auchan de 2014, les collectivités ont eu pendant 6 ou 7 ans à subir une avalanche de mauvaises nouvelles. En effet, schématiquement, en matière de fixation des taux de TEOM, le juge estimait et en large partie estime encore :

  • que la TEOM est une ressource dédiée et affectée aux OM et qu’il est interdit d’avoir une TEOM trop excédentaire… ou plus précisément, pour reprendre la formulation du juge, dont le taux ne doit pas « être manifestement disproportionné » par rapport au montant des dépenses « tel qu’il peut être estimé à la date du vote de la délibération fixant ce taux »
  • qu’il doit exercer un contrôle de l’erreur manifeste d’appréciation sur l’équilibre du budget… erreur manifeste d’appréciation qui se trouve parfois constituée dans des cas qui sont pour le gestionnaire public loin d’être manifestes !
  • que loi impose de prendre en compte la notion de « dépense réelle d’investissement », mais sans que soit précisée par le législateur la faculté d’intégrer les provisions, les sommes conservées pour un futur autofinancement dans le cadre d’un plan pluriannuel d’investissement (PPI)
  • qu’il n’est pas légal (sauf pour des pourcentages très faibles) de prévoir un excédent de précaution
  • qu’il peut même en résulter la gratuité in fine pour le contribuable victorieux au contentieux… Voir :

 

Mais après 6 ou 7 ans de vaches maigres, voici qu’un spectaculaire rééquilibrage est opéré par le juge administratif, au point que l’on peut penser que les jurisprudences en ce domaine sont maintenant non seulement stabilisées, mais aussi moins déséquilibrées :

Voici une vidéo à ce sujet faite au printemps 2022 et qui parcourt en 10 mn 25 ce sujet tout à fait passionnant si on tente de passer du contentieux à la prévention des contentieux, de l’attaque à la prévention des attaques :

https://youtu.be/aCaqgLChyLU

 

Sources citées au fil de cette vidéo par ordre d’apparition : CE, 31 mars 2014, Auchan, n°368111 ; TA Lyon, 9/1/2015, n°1402323 ; TA de Montreuil, 18 mai 2017, n°s 1434675 et 1439146, Groupe Auchan SA (voir cependant ensuite Conseil d’État, 11/07/2018, n° 412263) ; TA Lyon, 4 décembre 2017, n°1506949 et 1605089, n° 1507006 et 1507008, n°1507046, n°1507047, etc. ; CE 19/03/2018, n° 402946 ; CE, 25/06/2018, n° 414056 ; articles L. 2331-2 et L. 2331-4 du CGCT ;  TA Montreuil, 8 octobre 2018, n°1643344 – 1643345 ; CE, 28 avril 2014, n°357090 ; Jugements rendus le 23 mai 2018 par le TA de Cergy-Pontoise ; conclusions de M. Toutée sur CE, 8 juin 1990, Assaupamar, n°93191, publié au rec. ; CE, 18 mai 2018, n° 411045 et 411583 ; CE, 24/10/2018, Casino, n°413895 ;  III de l’article 1639 A du CGI ; TA Lyon, 14 novembre 2018, n° 1702610 ; LFI 2019 n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 ; art. L. 3662-2 et L. 5219-8-1 du CGCT ; CE, 20 septembre 2019, n° 419661 ; art. 1520 et 1521 du CGI ; CE, 13 février 1980, S.A. « Au Bon Marché », n° 10697, rec. T. p. 671 ; 
CE, 12 mars 2021, n° 442583, à publier aux tables du rec. ; CE, 1er juillet 2020, n° 424288 ; TA Lyon, n° 1803391-1803392, CANOL, 26 octobre 2020, C+ ; TA Lyon, n° 1904685, CANOL, 26 octobre 2020, C+ ; CE, 4 octobre 2021, n° 448651, à publier au recueil Lebon ; CE, 22 octobre 2021, N° 434900, à publier en intégral au recueil Lebon ; CE, 15 novembre 2021, n° 454125, à publier au recueil Lebon ; art. L. 2333-78 du CGCT ; CE, 29 novembre 2021, n° 454684.

Dans l’affaire « Auchan » concernant Lille Métropole, le juge avait tout de même censuré un excédent… de 2,5 % du budget ! Soit un niveau correspondant à une marge de sécurité…

De même un jugement  concernant cette fois le Grand Lyon portait sur un excédent de 15,5 % qui avait été considéré par le juge comme étant « manifestement disproportionné ». Voici ce jugement :

En revanche :

 

Puis, même si encore une fois le juge ne fixe en ces domaines absolument pas de pourcentage « légal ou illégal », car il privilégie une appréciation au cas par cas, et qu’à l’évidence la taille totale du budget compte (des pourcentages plus larges sont visiblement admis pour les budgets plus petits)… notons tout de même qu’en 2021 le Conseil d’Etat ait admis (pour une communauté d’agglomération) comme n’étant pas manifestement disproportionné un taux de… 14,6% (lequel selon nous n’eût pas manqué d’être censuré quelques années auparavant). Voir :

 

Dans la lignée de l’arrêt précité n° 438897, le TA de Versailles, s’agissant là encore d’une communauté d’agglomération, a même validé comme n’étant pas entaché d’une erreur manifeste d’appréciation un taux d’excédent de 14,58 %.

Fait intéressant, le juge déplore que » les documents budgétaires produits ne permettent pas d’identifier les seules dotations aux amortissements affectées au service des ordures ménagères». Mais (et cela s’avère très logique) il admet que la communauté d’agglomération, à la place, produise « l’inventaire des immobilisations affectées au seul service des ordures ménagères, qui indique le montant de l’amortissement pratiqué au titre de l’année 2018 pour chacune de ces immobilisations » (soit un montant de 962 153,75 euros au titre de l’année 2018). Cette acceptation de substitution est logique (voir ci-avant l’arrêt, précité, n° 424288).

Voici cette décision :

 

 

Le Conseil d’Etat a même rendu au printemps 2023 une intéressante décision confirmant qu’il faut même alors prendre en compte les charges exceptionnelles de fonctionnement (hors dépenses d’ordre)…. avec un excédent admis de 13,84 % en 2019 et de 11,35 % en 2020… ce qui était peu imaginable au lendemain du funeste arrêt Auchan.

Conseil d’État, 14 avril 2023, n° 465403, aux tables du recueil Lebon

 

Plus encore, la gratuité, pour le contribuable victorieux, ne sera plus automatiquement la récompense d’un recours contre son impôt (en cas, donc, de recours contre le titre exécutoire et non contre la délibération). 

En cas de TEOM excédentaire, devait-on, ensuite d’une annulation, pour le litige en cause  (si le contentieux portait non sur la délibération initiale mais sur l’avis d’imposition lui-même) :

  • appliquer le taux n-1 si celui-ci n’a pas été attaqué (solution normale applicable par défaut en contentieux fiscal… III de l’article 1639 A du code général des impôts)
  • OU recalculer la somme due pour enlever juste la part excédentaire (après tout sinon il y a enrichissement sans cause du contribuable)
  • OU estimer qu’il y a en ce cas 0 euro à payer ?.

 

Les jurisprudences variaient sur ce point.

Le TA de Cergy-Pontoise avait ainsi opté pour cette dernière solution, au terme d’un raisonnement … comment dire… audacieux. Voir :

 

Le Conseil d’Etat lui avait, hélas, emboîté le pas  mais avec une position un peu plus nuancée. Le Conseil d’Etat prévoyait nous semble-t-il :

  1. par défaut une décharge TOTALE en cas de TEOM excédentaire (et non un recalcul)
  2. mais il réserve l’hypothèse où un retour au taux de l’année n-1 serait possible et légal

Il interdit en revanche un raisonnement de diminution au cas par cas pour revenir à ce qu’était l’équilibre de la TEOM.

 

Voir :

Pour une application sévère, voir par exemple TA Lyon, 14 novembre 2018, n° 1702610.

Cf. cette petite vidéo courroucée sur l’état du droit à l’époque :

https://youtu.be/NcKryBM6Vg0

 

Fort heureusement, le Conseil d’Etat a ensuite fait volte-face (il est bien connu qu’il ne fait jamais de demi-tour, mais qu’il affine subtilement sa jurisprudence… mais bon là on glisse vers le 180°) : il a en effet rendu une autre décision où il faisait prévaloir l’interprétation la plus optimiste (du point de vue des acteurs publics, qui sont nos clients et qui représentent l’intérêt général).

La Haute Assemblée y pose que lorsque la délibération fixant le taux de la taxe d’enlèvement des ordures ménagères (TEOM) ne peut plus servir de fondement légal à l’imposition au motif que ce taux est manifestement disproportionné par rapport aux dépenses à couvrir l’année en litige, il appartient au juge de l’impôt, saisi d’une demande en ce sens :

  1. de rechercher s’il y a lieu de lui substituer le taux résultant de la délibération applicable à l’année précédente.
  2. Tel n’est pas le cas lorsque le taux de l’année précédente est manifestement disproportionné au regard du montant des dépenses estimé au titre de l’année en litige.

 

En de pareil cas, les jurisprudences à ce jour entre TA étaient tout à fait contradictoires.

Désormais, le point de principe posé par le Conseil d’Etat et qui sur ce point sera repris par toutes les juridictions, sauf très improbable rébellion, sera ainsi formulé :

« lorsque la délibération fixant le taux de la taxe d’enlèvement des ordures ménagères ne peut plus servir de fondement légal à l’imposition au motif que ce taux est manifestement disproportionné par rapport aux dépenses à couvrir l’année en litige, il appartient au juge de l’impôt, saisi d’une demande en ce sens, de rechercher s’il y a lieu de lui substituer le taux résultant de la délibération applicable à l’année précédente. Tel n’est pas le cas lorsque le taux de l’année précédente est manifestement disproportionné au regard du montant des dépenses estimé au titre de l’année en litige.»

 

Voici cette décision :

Voir aussi les conclusions de Mme Céline GUIBE, Rapporteure publique :

 

D’où in fine le schéma suivant :

 

II. Avec désormais la possibilité d’inclure dans ces dépenses « le coût de la collecte et du traitement des déchets et immondices jetés dans les corbeilles de rue ou sur la voie publique »

 

Qu’est-ce qu’un déchet ? Au sens de l’article L. 541-1-1 du Code de l’environnement, c’est « toute substance ou tout objet, ou plus généralement tout bien meuble, dont le détenteur se défait ou dont il a l’intention ou l’obligation de se défaire ».

Et l’article suivant de ce même code précise, entre autres obligations, que le « producteur ou détenteur de déchets est responsable de la gestion de ces déchets jusqu’à leur élimination ou valorisation finale, même lorsque le déchet est transféré à des fins de traitement à un tiers. »

Avec quelques conséquences et modalités renouvelées de sortie de ce statut de déchet  (par transposition de la directive 2018/851 et en application de l’article 115 de la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 (loi AGEC) relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire) :

 

Il n’y a plus de débat sur le fait que ne relèvent pas de cette catégorie : les sols non excavés ; les sédiments déplacés au sein des eaux de surface ; les effluents gazeux émis dans l’atmosphère ; le dioxyde de carbone capté et transporté en vue de son stockage géologique et effectivement stocké dans une formation géologique ; la paille et les autres matières naturelles non dangereuses issues de l’agriculture ou de la sylviculture et qui sont utilisées dans le cadre de l’exploitation agricole ou sylvicole ; les matières radioactives ; les sous-produits animaux ou les produit dérivés ; et quelques autres produits. En effet, l’article L. 541-4-1 du code de l’environnement exclut désormais de manière très claire ces produits ou matériaux (qui ont leurs propres régimes juridiques) de la liste des déchets (avec cependant de petits débats entre droit européen et français, notamment sur la notion de déchet radioactif).
Reste que les notions de déchet, par opposition aux notions de produit et de sous-produits, continuent de donner lieu à moult débats. Une substance produite pour être réutilisée ensuite est-elle un produit, ou un déchet au moins dans certains cas ?
Sur ces points, nous avions déjà évidemment quelques réponses jurisprudentielles européennes (CJCE, n° C-457/02, Conclusions de l’avocat général de la Cour, Procédure pénale contre Antonio Niselli, 10 juin 2004 ; CJCE, n° C-457/02, Arrêt de la Cour, Procédure pénale contre Antonio Niselli, 11 novembre 2004 ; CJCE, n° C-188/07, Arrêt de la Cour, Commune de Mesquer contre Total France SA et Total International Ltd, 24 juin 2008 ; CJCE, n° C-283/07, Arrêt de la Cour, Commission des Communautés européennes contre République italienne, 22 décembre 2008 ; CJCE, n° C-195/05, Arrêt de la Cour, Commission des Communautés européennes contre République italienne, 18 décembre 2007…).
Le Conseil d’Etat lui aussi avait donné ses modes d’emploi (CE, 26 juillet 2011, Société Lanvin S.A., n° 324728, rec. T. p. 1034), et dont voici le résumé aux tables du rec., à l’époque :
« Pour l’application de la législation relative aux installations classées, doit être regardée comme déchet toute substance qui n’a pas été recherchée comme telle dans le processus de production dont elle est issue, à moins que son utilisation ultérieure, sans transformation préalable, soit certaine.»
Notamment, n’est pas un déchet (car n’est pas un résidu de production) un produit dont la production est un choix technique en soi (pour le coke de pétrole produit afin d’être utilisé comme combustible de cogénération : CJCE, n° C-235/02, Ordonnance de la Cour, Procédure pénale contre Marco Antonio Saetti et Andrea Frediani, 15 janvier 2004).
Mais tout ceci était avant l’évolution du droit européen (notamment la directive n° 2008/98/CE du Parlement européen et du Conseil du 19 novembre 2008) et du droit français (ordonnance n° 2010-1579 du 17 décembre 2010)…
Par une importante décision « Ministère de la transition écologique c/ Société Ahouandjinou », le Conseil d’Etat avait posé :
  • qu’un déchet au sens de l’article L. 541-1-1 du code de l’environnement, pris pour la transposition de la directive n° 2008/98/CE du Parlement européen et du Conseil du 19 novembre 2008, est un bien dont son détenteur se défait ou dont il a l’intention de se défaire (reprise du texte de la loi issu du droit européen, donc)
  • et ce (là commencent les nouveautés — toutes relative d’ailleurs — issues de cette décision ) :
    • sans qu’il soit besoin de déterminer si ce bien a été recherché comme tel dans le processus de production dont il est issu.
    • et ce sans qu’il faille tenir compte du point de savoir si, oui ou non, les biens en cause auraient une valeur commerciale et soient susceptibles de donner lieu à une réutilisation économique (ce qui évite les argumentaires visant à faire sortir de la notion de déchet un produit juste au motif qu’il pourrait être revendu. Mais en l’espèce ce n’était pas le point à trancher dans le litige en question).

 

Cet arrêt était donc un coup d’arrêt aux espoirs de nombreux acteurs de voir leurs sous produits ou produits sortir de la notion de déchet juste au motif qu’ils peuvent être recyclés ou tout simplement vendus. Il était aussi en nette évolution quant à la notion de déchet par rapport, entre autres, à l’arrêt C-235/02 de la CJCE précité, ou par rapport à l’arrêt n° 324728, du CE, également mentionné ci-avant… Avec une intéressante application, en l’espèce, en matière de pneumatiques.

Source : CE, 24 novembre 2021, n° 437105, à mentionner aux tables du recueil Lebon

Voir la vidéo (6 mn 30)  que j’avais, alors, commise:

https://youtu.be/EBwmkh3YL1s

 

 

Précisons que cette notion de déchet :

 

 

En matière de dépôts sauvages de déchets (voir notamment la vidéo de Yann Landot ici), le Conseil d’Etat a ainsi facilité la vie des personnes publiques en acceptant qu’un bien abandonné sur un terrain, dont le détenteur du bien est le propriétaire, pourra toutefois être quand même considéré comme abandonné et donc comme étant un déchet. Le Conseil d’Etat a ainsi forgé une sorte de présomption selon laquelle on a voulu se séparer de ces biens, qui deviennent des déchets, en fonction des critères qui seront « leur état matériel, […] leur perte d’usage et […]  la durée et des conditions de leur dépôt, en état d’abandon sur un terrain » même si le propriétaire du terrain est celui qui a abandonné les déchets et même si celui-ci prétend l’inverse (sauf réutilisation suffisamment certaine, ce qui n’est pas loin d’inverser la charge de la preuve, mais on comprend le juge, car il y a tout de même une présomption de déchet si le bien est laissé à l’abandon !). Citons les tables du rec. : 

«  2) a) Lorsque des biens se trouvent, compte tenu en particulier de leur état matériel, de leur perte d’usage et de la durée et des conditions de leur dépôt, en état d’abandon sur un terrain, ils peuvent alors être regardés comme des biens dont leur détenteur s’est effectivement défait et présenter dès lors le caractère de déchets au regard de l’article L. 541-1-1 du code de l’environnement, alors même qu’ils y ont été déposés par le propriétaire du terrain. b) Au regard de ces critères, lorsque les circonstances révèlent que la réutilisation de ces biens sans transformation n’est pas suffisamment certaine, les seules affirmations du propriétaire indiquant qu’il n’avait pas l’intention de se défaire de ces biens, ne sont pas susceptibles de remettre en cause leur qualification comme déchet. »

Source :

 

 

Cette approche large, décidément, de la notion de déchet, devenait en contradiction avec le fait que, souvent, les TA refusaient que les dépenses des poubelles de rue soient prises en compte dans la TEOM.

Ce hiatus, le Conseil d’Etat vient d’y mettre fin. Heureusement.

Dijon Métropole avait en l’espèce pris prendre en compte, au titre des dépenses du service de collecte et de traitement des déchets ménagers, le « coût de la collecte et du traitement des déchets et immondices jetés dans les corbeilles de rue ou sur la voie publique » , ce qui a été censuré par le TA de Dijon « au motif que ces déchets étaient produits non par les ménages mais par les usagers de l’espace public ».

Ce raisonnement du TA, le Conseil d’Etat l’a censuré, en posant que :

« 5. Les dépenses susceptibles d’être prises en compte sont constituées de la somme, telle qu’elle peut être estimée à la date du vote de la délibération fixant le taux de la taxe, de toutes les dépenses de fonctionnement réelles exposées pour le service public de collecte et de traitement des déchets ménagers et des déchets mentionnés à l’article L. 2224-14 du code général des collectivités territoriales et des dotations aux amortissements des immobilisations qui lui sont affectées lorsque la taxe n’a pas pourvu aux dépenses réelles d’investissement correspondantes ou des dépenses réelles d’investissement lorsque la taxe n’a pas pourvu aux dotations aux amortissements.
« 
6. En vertu de l’article R. 2224-23 du code général des collectivités territoriales, les ” déchets ménagers ” sont ceux définis à l’article R. 541-8 du code de l’environnement, lequel regarde comme tel ” tout déchet, dangereux ou non, dont le producteur est un ménage “. Par ailleurs, l’article L. 541-1-1 du même code définit le déchet comme ” toute substance ou tout objet, ou plus généralement tout bien meuble, dont le détenteur se défait ou a l’obligation de se défaire “. Il résulte de ces dispositions qu’a le caractère d’un déchet ménager au sens et pour l’application des règles fiscales rappelées aux points 3 à 5 tout bien ayant la nature d’un déchet habituellement produit par les ménages, que ce soit au sein ou hors du foyer.»

 

D’où une censure de la positon du TA de Dijon qui devra rejuger l’affaire :

« 8. D’autre part, en jugeant que Dijon Métropole n’était pas fondé à prendre en compte, au titre des dépenses du service de collecte et de traitement des déchets ménagers, le coût de la collecte et du traitement des déchets et immondices jetés dans les corbeilles de rue ou sur la voie publique au motif que ces déchets étaient produits non par les ménages mais par les usagers de l’espace public, alors qu’il résulte de ce qui a été dit aux points 4 à 6 que ne sont exclus du champ des dépenses éligibles que les déchets qui n’ont pas la nature, soit des déchets habituellement produits par les ménages, soit de ceux, mentionnés à l’article L. 2224-14 du code général des collectivités territoriales, que les collectivités peuvent, eu égard à leurs caractéristiques et aux quantités produites, collecter et traiter sans sujétions techniques particulières, le tribunal a également commis une erreur de droit.»

Voici le futur résumé des tables du rec.:

« Il résulte des articles R. 2224-23 du code général des collectivités territoriales (CGCT) et des articles L. 541-1-1 et R. 541-8 du code de l’environnement qu’a le caractère d’un déchet ménager, au sens et pour l’application des règles relatives à la détermination des dépenses susceptibles d’être prises en compte pour la détermination du taux de la taxe d’enlèvement des ordures ménagères (TEOM), tout bien ayant la nature d’un déchet habituellement produit par les ménages, que ce soit au sein ou hors du foyer.»

D’où pour les calculs de la TEOM :

  • une inclusion certaine des dépenses de poubelle de rue
  • une inclusion très probable des dépenses de ramassage de déchet sur voirie
  • une inclusion très incertaine des dépenses de nettoyage de rue plus globale, mais qui commence à être possible, plaidable.

 

Nb : la nouvelle décision du Conseil d’Etat est aussi intéressante en matière de provision (voir le point 7. de l’arrêt) mais ne sur-interprétons pas ce point  qui est essentiellement soulevé comme n’étant pas un point que le juge du fond pouvait soulever seul, en tant que MOP (moyen d’ordre public). La formation retenue sur ce point par le Conseil d’Etat porte donc plus sur cet élément procédural que sur les provisions en comptabilité M57. 

 

Voici cette nouvelle décision :

Conseil d’État, 18 septembre 2023, Association syndicale libre (ASL) du centre de commerces et de loisirs de la Toison d’Or, n° 466461, aux tables du recueil Lebon

source : https://pixabay.com/fr/users/denisdoukhan-607002/ (cadrage modifié)