Béziers nouvelle Mecque du droit administratif ? ou nouveau bêtisier en matière de droits de l’homme ? En tous cas, que d’épisodes et de rebondissements dans la vie juridique de cette ville depuis quelques temps…
Rappel des épisodes précédents :
- La CAA confirme la suspension de la décision biterroise de ficher les chiens et leurs maîtres… mais via un autre raisonnement que le TA
- La communication municipale de Béziers anti-arrivée de migrants n’est pas censurée par le juge du référé liberté
- Ben non… on ne peut faire Justice soi-même. Ben oui, c’est le travail du juge de le rappeler aux citoyens (sic) et même à l’Etat (re-sic)
- Béziers : le juge censure le fichage des chiens et de leurs maîtres
- Confirmation : ni milice privée ni sécurité privée sur la voie publique
- Ni milice privée ni sécurité privée sur la voie publique
- Béziers : l’arrêté de couvre-feu des mineurs pour l’essentiel validé par la CAA de Marseille
Cette fois-ci, c’est la décision bitteroise d’implanter une crèche de Noël en mairie qui est annulée (à la suite de décisions en ce sens en 2014, 2015 et 2016. Une décision qui ne surprendra personne vu la jurisprudence en la matière et que voici retracée en trois brèves :
- Laurent Wauquiez peut garder sa crèche à l’hôtel de région : le TA vient d’estimer qu’il n’y a pas d’urgence à statuer en référé suspension.
- Hénin-Beaumont privée de crèche de Noël
- Le Conseil d’Etat coupe les crèches de Noël en 2 et les cheveux en 4
Rappelons le mode d’emploi fixé par le Conseil d’Etat (CE, 9 novembre 2016, Fédération de la libre pensée de Vendée et Fédération départementale des libres penseurs de Seine-et-Marne (deux espèces ; n° 395223 et n° 395122). Une crèche sera :
- légale si elle présente un caractère culturel, artistique ou festif,
- illégale si elle exprime la reconnaissance d’un culte ou une préférence religieuse.
Rappelons que ledit Conseil d’Etat a estimé que pour :
« déterminer si l’installation d’une crèche de Noël présente un caractère culturel, artistique ou festif, ou si elle exprime au contraire la reconnaissance d’un culte ou une préférence religieuse, le Conseil d’État juge qu’il convient de tenir compte du contexte dans lequel a lieu l’installation, des conditions particulières de cette installation, de l’existence ou de l’absence d’usages locaux et du lieu de cette installation.
Compte tenu de l’importance du lieu de l’installation, le Conseil d’État précise qu’il y a lieu de distinguer les bâtiments des autres emplacements publics :
• dans les bâtiments publics, sièges d’une collectivité publique ou d’un service public, une crèche de Noël ne peut pas être installée, sauf si des circonstances particulières montrent que cette installation présente un caractère culturel, artistique ou festif ;
• dans les autres emplacements publics, compte tenu du caractère festif des installations liées aux fêtes de fin d’année, l’installation d’une crèche de Noël est légale, sauf si elle constitue un acte de prosélytisme ou de revendication d’une opinion religieuse.
Faisant application de ces principes, le Conseil d’État casse les deux arrêts dont il était saisi, l’un qui avait jugé que le principe de neutralité interdisait toute installation de crèche de Noël, l’autre qui ne s’était pas prononcé sur l’ensemble des critères pertinents. Dans la première affaire, il juge que l’installation de crèche litigieuse méconnaissait le principe de neutralité. Il renvoie la seconde affaire à la cour administrative d’appel de Nantes, afin qu’elle se prononce sur l’ensemble des éléments à prendre en compte. »
Vu cette grille fixée par le Conseil d’Etat le 9 novembre 2016 (avant Noël 2016 donc, date où il aurait été temps pour une commune de faire machine arrière…), il ne faisait pas de doute que l’installation d’une crèche en mairie (de Béziers donc) allait être annulée par le juge administratif. Mais un peu tard…
L’arrêt a été rendu hier (lundi 3 avril 2017) en fin d’après midi. Le voici (CAA Marseille, 3 avril 2017, M. G.G. et autre c. Commune de Béziers, n° 15MA03863) :
15MA03863 arrêt
N.B. : le Maire de Béziers a annoncé son intention de se pourvoir en cassation devant le Conseil d’Etat, lequel a peu de probabilités de revenir sur sa position fixée en ce domaine le 9 novembre 2016…
Dans ce domaine, aucune surprise donc. La seule surprise de ce feuilleton juridictionnel aura été le fait que la commune avait gagné en première instance avant que le CE ne fixe sa jurisprudence.