Un élu est condamné pour homicide involontaire. Un autre l’est pour injure ou diffamation. Ont-ils le droit à la protection fonctionnelle (prise en charge de leurs frais d’avocats par la commune) ?

Un élu est condamné pour homicide involontaire. Un autre l’est pour injure ou diffamation. Ont-ils le droit à la protection fonctionnelle (prise en charge de leurs frais d’avocats par la commune) ?

N.B. : sur ce régime, voir :

 

Commençons par le premier de ces deux cas. Celui, évidement très médiatisé, de La Faute-sur-mer.

Le maire est condamné. Il va jusqu’en cassation. Ses frais de recours en cassation peuvent-ils, et même doivent-ils être pris en charge par la commune ?

OUI répond le TA de Nantes.

En effet, aux termes du deuxième alinéa de l’article L. 2123-34 du code général des collectivités territoriales :

« La commune est tenue d’accorder sa protection au maire, à l’élu municipal le suppléant ou ayant reçu une délégation ou à l’un de ces élus ayant cessé ses fonctions lorsque celui-ci fait l’objet de poursuites pénales à l’occasion de faits qui n’ont pas le caractère de faute détachable de l’exercice de ses fonctions. ».

Or, le débat pourrait exister sur le point de savoir si nous avons là une faute de service ou une faute personnelle non détachable du service, mais il n’y a pas de doute sur le fait qu’en pareil cas la faute n’est pas détachable de l’exercice des fonctions.

Le TA y a donc vu une faute, certes, mais non détachable de l’exercice des fonctions du maire. La commune n’était donc, selon ce tribunal, pas fondée à refuser ladite protection fonctionnelle à son ancien maire :

  • TA Nantes, 9 octobre 2019, n°1710480 :

 

Or, à peu près en même temps, voici que le petit monde médiatique local s’intéresse au cas d’un maire qui, lui, se fait payer ses frais d’avocats pour des questions d’injure et de diffamation dont il est, non pas la victime (car là il n’y aurait eu aucun débat juridique.. à la condition qu’existe un lien entre les fonctions et les injures ou les diffamations ; voir ici) mais l’auteur. Un auteur condamné. Voir :

 

La solution à apporter serait-elle la même ?

Nul doute que des injures ou des diffamations constituent des fautes personnelles. Mais sont-elles détachables du service ?

Des décisions vont en ce sens (voir par exemple Tribunal des conflits, 26 octobre 1981, préfet Bouches-du-Rhône : Rec. CE 1981, p. 657 dont le résumé aux tables est fort clair : « Les propos injurieux tenus par un fonctionnaire à l’encontre d’un autre fonctionnaire à l’occasion d’une réunion de service, injustifiés au regard des pratiques administratives normales et révélant une certaine animosité entre les intéressés, constituent une faute personnelle détachable du service »…)… SAUF QUE les échanges politiques sont inhérents à la démocratie locale, ainsi que les relations vives avec les médias locaux. Donc l’affaire demeure incertaine en droit.

A noter par ailleurs : le régime de la protection fonctionnelle des élus pourrait à l’avenir ne pas passer par une délibération. Voir les évolutions du projet de loi engagement et proximité en ce sens :

Voir aussi :

 

A suivre…

 

Les parapluies juridiques que sont les protections fonctionnelles risquent en effet de ne pas avoir tous la même efficacité selon les cas…

 

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Crédit photographique :  Stephane YAICH on Unsplash