La loi engagement et proximité et la loi d’orientation des mobilités laissaient aux acteurs locaux, notamment aux intercommunalités, quelques mois pour faire des choix tout à fait cruciaux. Certains de ces délais ont été prolongés ou aménagés pour cause de Covid-19. Rappelons ces importantes échéances au moment où recommencent à s’installer certaines communes et communautés.
Rappel :
- Installation des conseils municipaux dans les communes où l’élection a été acquise au 1er tour : le décret est au JO de ce matin
- Décorticage de l’importante ordonnance de ce matin relative aux institutions des collectivités locales (dont les futures installations de conseils municipaux)
- Que va-t-il se passer pour les communes où l’élection a été acquise au 1er tour ? [courte vidéo]
Ce calendrier est connu et avec des échéances à bref délai pour les communes où l’élection est définitivement acquise depuis le 15 mars et pour les EPCI uniquement composés de telles communes. Il est plus complexe et plus incertain dans les autres territoires. Voir ce tableau récapitulatif :
Ceci posé, revenons sur certaines échéances à venir.
I. Eau et assainissement : une échéance à fin septembre pour les communautés de communes et d’agglomération qui veulent passer des conventions de gestion avec des syndicats enclavés
Les intercommunalités à fiscalité propre ont récupéré les compétences eau et assainissement (et parfois les eaux pluviales urbaines, cela dépend des types de communautés).
Toutes les intercommunalités ? NON car dans certaines communautés de communes, villes et villages ont pu décider avec une minorité de blocage de reporter cette échéance, au plus tard à 2026, selon un régime complexe que nous avons souvent commenté sur le présent blog (modifié à l’été 2018 par la loi Ferrand Fesneau 2018-702 du 3 août 2018, puis par la loi n° 2019-1461 du 27 décembre 2019).
Les communes et les communautés ou métropoles peuvent passer divers types de conventions, selon un régime largement remodelé par la loi engagement et proximité. Ces conventions ne sont pas bridées dans le temps : seules des raisons techniques conduisent à aller vite (pour éviter un transfert puis re-transfert de compétences).
MAIS S’IL S’AGIT DE CONVENTIONS AVEC UN SYNDICAT inclus dans le périmètre intercommunal, alors s’applique un délai strict de 6 mois à compter du 1er janvier 2020 pour pouvoir passer de telles conventions… délai allongé pour atteindre 9 mois en raison de la pandémie actuelle, et ce en application de l’ordonnance n° 2020-391 du 1er avril 2020 (NOR: COTB2008607R).
L’article 9 de cette ordonnance accorde un temps supplémentaire aux établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre dans leurs délibérations en matière d’eau, d’assainissement, de gestion des eaux pluviales urbaines.
Cet article prévoit ainsi de maintenir trois mois supplémentaires les syndicats infracommunautaires existant au 1er janvier 2019, le temps que la communauté de communes ou d’agglomération titulaire de la compétence délibère, ou non, sur une délégation de compétence en faveur de ces syndicats, conformément aux dispositions de la loi n° 2019-1461 relative à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique.
Le rapport de présentation de l’ordonnance rappelle que cette disposition ne compromet pas la possibilité de délibérer sans attendre la fin de ce délai de trois mois supplémentaires, soit en vue de déléguer, soit en vue de ne pas y pourvoir, entraînant alors la dissolution de la structure syndicale.
Voir à ces sujets, pour rappeler l’état du droit :
- Communautés de communes : en 3mn30, que va changer la loi engagement et proximité ? [VIDEO]
- Communautés d’agglomération : en – de 3mn, que va changer la loi engagement et proximité ? [COURTE VIDEO]
- Syndicats des eaux : 4 questions sur ce que change la loi engagement et proximité [VIDEO de – de 3 mn]
- 5 questions sur le nouveau régime de conventions en matière d’eau ou d’assainissement [courte VIDEO]
NB : les délais de 6 mois évoqués dans ces vidéos étant donc maintenant de 9 mois.
II. Mobilités : une importante échéance au 31 mars pour les communautés de communes (à préparer dès maintenant ; le sujet méritant une étude approfondie)
Au pied du sapin, au JO du 25 décembre dernier, se trouvait la loi n° 2019-1428 du 24 décembre 2019 d’orientation des mobilités, dite LOM. Il en résulte notamment que les communautés de communes qui à ce jour n’exercent pas la compétence mobilités ont quelques mois pour décider entre prendre, ou ne pas prendre, cette compétence. Un choix majeur en peu de temps, en des temps troublés.
Les autorités organisatrices de mobilité (AOM) que sont par défaut les intercommunalités à fiscalité propre ou des grands syndicats, se voient confortées dans leurs missions : cette loi a donc bâti un tandem région/intercommunalité renforcé (avec ou sans présence des départements selon que ces derniers ont, ou n’ont pas, conventionné avec la région)… à ceci près que les communautés de communes pourront sortir du dispositif.
En effet, selon la LOM, au plus tard le 1er juillet 2021, les communautés de communes seront soit AOM soit auront transféré la compétence aux régions (tout en pouvant continuer de financer certaines dépenses de mobilité).
NB : avec quelques spécificités (notamment en Ile-de-France).
La procédure passera par une délibération du conseil communautaire (à la majorité simple, puis par des votes des conseils municipaux des communes membres qui ont trois mois pour délibérer à la majorité usuelle (moitié-deux tiers ou l’inverse, dont la ville la plus peuplée si celle-ci atteint 25% de la population), avec avis implicitement favorable. Puis s’ouvre une période de trois mois de transfert opérationnel de la compétence.
C’est là qu’intervient l’ordonnance n° 2020-391 du 1er avril 2020 (NOR: COTB2008607R) : celle-ci proroge, en son article 9, de trois mois ce délai pour la délibération de l’organe délibérant en vue du transfert de la compétence d’organisation de la mobilité à la communauté de communes, lorsqu’il n’y a pas déjà été procédé.
Cette délibération devra ainsi intervenir avant le 31 mars 2021 au lieu du 30 décembre 2020, pour que le transfert de compétence prenne, ou non, effet au 1er juillet 2021.
Cela dit, la prise de la compétence pour lesdites communautés de communes ne doit pas non plus paraître tel un obstacle infranchissable. En effet :
Les communautés de communes ont donc peu de temps pour trancher cet aspect important de leur avenir. Un choix important pour environ les 900 communautés de communes qui ne se sont pas emparées de la compétence autorité organisatrice des mobilités (AOM). Si l’on ajoute la période d’installation des conseils et la période estivale, il faut sans doute s’y prendre très en amont pour lancer les études correspondantes…
La loi d’orientation des mobilités (LOM) n° 2019-1428 du 24 décembre 2019 avait laissé un délai aux communautés de communes pour prendre, ou ne pas prendre, la compétence mobilités. Voir :
L’ordonnance n° 2020-391 du 1er avril 2020 (NOR: COTB2008607R), publiée au JO de ce matin, donne à ces communautés de communes un délai de grâce.
Elle proroge, en son article 9, de trois mois ce délai pour la délibération de l’organe délibérant en vue du transfert de la compétence d’organisation de la mobilité à la communauté de communes, lorsqu’il n’y a pas déjà été procédé.
Cette délibération devra ainsi intervenir avant le 31 mars 2021 au lieu du 30 décembre 2020, pour que le transfert de compétence prenne, ou non, effet au 1er juillet 2021.
Voir aussi :
Voici une courte vidéo (4 mn 18) sur les choix qui vont devoir être faits d’ici à mars 2021 dans 900 communautés de communes, à savoir prendre la compétence mobilité ou la confier à la région :
III. PLUI (renouvellement, ou non, de l’opposition au passage au PLUI pour les communes membres, dans ceux des EPCI où la loi ALUR laisse encore cette faculté d’opposition)
Le droit des plans locaux d’urbanisme intercommunaux (PLUI) est devenu fort complexe avec la fameuse et très controversée loi ALUR n° 2014-366 du 24 mars 2014.
Création ou fusion avant le 27 mars 2017 | Création ou fusion après le 27 mars 2017 | |
Communauté urbaine et métropole | Obligatoire | Obligatoire |
Communauté de communes ou d’agglomération | • Obligatoire sauf vote dérogatoire (25 % des communes ; 20 % de la population ; dans les trois mois précédant le 27 mars 2017 puis en cas de renouvellement général des conseils municipaux ou en cas d’initiative communautaire postérieure à mars 2017). Mais la compétence peut aussi avoir été adoptée volontairement par extension de compétences avant mars 2017.• mais pas d’opposition possible en cas de fusion d’EPCI à fiscalité propre dont au moins un avait pris la compétence avant cette date (sauf astuce : la communauté ayant cette compétence la perd au 30 décembre 2016 et crée un syndicat pour gérer celle-ci à cette même date)… ou sauf modification de la loi | Sans doute obligatoire, non sans grandes complexités (voir par exemple ici) |
L’article 136 de cette loi ALUR dispose que :
« II. – La communauté de communes ou la communauté d’agglomération existant à la date de publication de la présente loi, ou celle créée ou issue d’une fusion après la date de publication de cette même loi, et qui n’est pas compétente en matière de plan local d’urbanisme, de documents d’urbanisme en tenant lieu ou de carte communale le devient le lendemain de l’expiration d’un délai de trois ans à compter de la publication de ladite loi. Si, dans les trois mois précédant le terme du délai de trois ans mentionné précédemment, au moins 25 % des communes représentant au moins 20 % de la population s’y opposent, ce transfert de compétences n’a pas lieu.
« Si, à l’expiration d’un délai de trois ans à compter de la publication de la présente loi, la communauté de communes ou la communauté d’agglomération n’est pas devenue compétente en matière de plan local d’urbanisme, de documents d’urbanisme en tenant lieu ou de carte communale, elle le devient de plein droit le premier jour de l’année suivant l’élection du président de la communauté consécutive au renouvellement général des conseils municipaux et communautaires, sauf si les communes s’y opposent dans les conditions prévues au premier alinéa du présent II.
« Si, à l’expiration d’un délai de trois ans à compter de la publication de la présente loi, la communauté de communes ou la communauté d’agglomération n’est pas devenue compétente en matière de plan local d’urbanisme, de documents d’urbanisme en tenant lieu ou de carte communale, l’organe délibérant de l’établissement public de coopération intercommunale peut également à tout moment se prononcer par un vote sur le transfert de cette compétence à la communauté. S’il se prononce en faveur du transfert, cette compétence est transférée à la communauté, sauf si les communes membres s’y opposent dans les conditions prévues au premier alinéa du présent II, dans les trois mois suivant le vote de l’organe délibérant de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre.
« III. – Dans les trois ans qui suivent la publication de la présente loi, les communes membres d’une communauté de communes ou d’une communauté d’agglomération peuvent transférer la compétence en matière de plan local d’urbanisme, de documents d’urbanisme en tenant lieu ou de carte communale, mentionnée au II du présent article, selon les modalités prévues à l’article L. 5211-17 du code général des collectivités territoriales. »
DONC :
- soit l’EPCI est une communauté urbaine ou une métropole, et nulle question ne se pose (l’EPCI a déjà la compétence PLUI)
- soit l’EPCI est une communauté de communes et d’agglomération et alors :
- si cet EPCI a déjà la compétence PLUI, nulle question ne se pose
- s’il n’a pas encore cette compétence, alors les communes peuvent décider, ou non, de renouveler leur opposition avec la même minorité de blocage (au moins 25 % des communes représentant au moins 20 % de la population) à la condition de re-voter dans les conditions prévues par cette loi.
IV. Pacte de gouvernance : un délai de 9 mois plus complexe qu’il n’y paraît
La loi n° 2019-1461 du 27 décembre 2019 relative à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique a donné une base juridique au « pacte de Gouvernance ».
Pour un EPCI à fiscalité propre (communauté de communes, communauté d’agglomération, communauté urbaine ou métropole (avec une spécificité pour les établissements publics territoriaux de la Métropole du Grand Paris), il sera impératif de s’interroger sur le pacte de gouvernance, mais sans obligation de l’adopter :
- lors d’une fusion (logique)
- lors du renouvellement général des conseils municipaux (logique)
- mais aussi lors d’une scission (partage) d’EPCI à fiscalité propre en plusieurs nouveaux EPCI à fiscalité propre (nouveau régime de l’article L. 5211-5-1 A du CGCT)
Il incombe alors au Président de l’EPCI à fiscalité propre d’inscrire à l’ordre du jour de son conseil communautaire ou métropolitain deux points :
« 1° Un débat et une délibération sur l’élaboration d’un pacte de gouvernance entre les communes et l’établissement public ;
« 2° Un débat et une délibération sur les conditions et modalités de consultation du conseil de développement prévu à l’article L. 5211-10-1 et d’association de la population à la conception, à la mise en œuvre ou à l’évaluation des politiques de l’établissement public.
Important : d’ailleurs ce conseil de développement est désormais obligatoire à compter de 50.000 habitants… et non de 20.000 habitants.
Le Pacte de gouvernance est-il donc obligatoire ?
NON. Il doit être débattu, mais n’est pas obligatoire (contrairement à ce que voulait le Sénat). Simplement, s’il doit être adopté, il doit l’être dans un délai de 9 mois suivant, donc, la fusion, le renouvellement général des conseils municipaux ou la scission de communauté.
Le calendrier peut donc sembler souple : 9 mois est un délai raisonnable pour une telle gestation.
SAUF QUE :
- dans le cas du renouvellement général des conseils municipaux, le délai court à compter dudit renouvellement (gageons qu’il sera raisonnable de se fonder sur la date du second tour) alors que le conseil de communauté ou le conseil métropolitain ne se mettra réellement en place que quelques semaines plus tard (au plus tard le 4e vendredi suivant la date d’élections des maires et adjoints, soit en général au plus tard presque 5 semaines après le second tour ; un délai qui peut être réduit mais non sans limites).
C’est là que dans le cadre actuel de l’état d’urgence sanitaire, on va avoir des calendriers variés selon que l’on a des intercommunalités recomposées ou au contraire « mixées » (voir le graphique en début d’article…).
- le délai de 9 mois est un délai ultime d’adoption (même si l’on voit mal ce que peut être la sanction d’une adoption tardive, la valeur juridique de ce pacte restant limitée).. or,
- il faut commencer par une délibération de l’organe délibérant intercommunal (ce point pourrait cependant être débattu en droit, la loi étant sur ce point, comme pas mal d’autres à vrai dire, fort mal rédigée)
- puis laisser 2 MOIS aux conseils municipaux pour que ceux-ci donnent leur AVIS (avis simple donc) à ce sujet. Par analogie avec d’autres procédures, il est raisonnable de penser que ce délai ne peut être réduit que si tout le monde, si tous les conseils municipaux ont délibéré (voir en ce sens, par analogie donc, CE, 23 juillet 2012, n°342849)
- puis (semble-t-il donc, en tous cas telle serait une interprétation prudente) nouvelle délibération du conseil communautaire (ou métropolitain)…
A ces sujets voir :
V. Pouvoirs de police intercommunaux
Attention les maires et, dans certains cas, les présidents des EPCI concernés auront six mois à compter de l’élection du président de la communauté ou de la métropole (et parfois du syndicat compétent dans le cas des ordures ménagères) pour s’opposer le cas échéant au transfert de certains pouvoirs de police intercommunaux (voir art. L. 5211-9-2 du CGCT).
Voir :
Les Maires qui entendent s’opposer à ce transfert en tout ou partie doivent donc le notifier dans le délai de 6 mois suivant l’élection et être bien précis s’ils entendent en autoriser certains et s’opposer à d’autres. Enfin on rappellera que l’opposition doit être formulée par le Maire lui-même et non pas une délibération du conseil municipal.
Le Président pourra s’appuyer sur le refus de tout ou partie des Maires pour renoncer à l’exercice de ces pouvoirs de police.
VI. Règlement intérieur
Voir aussi l’adoption du Règlement intérieur (RI) dès 1000 habitants désormais dans les 6 mois suivant l’installation du conseil municipal ou de l’organe délibérant intercommunal (avec entre temps, désormais, maintien de l’ancien RI). Voir notamment :
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